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Guerres & impérialisme Conflit israélo-palestinien : tir d’essai par le Hamas d’une roquette de 60 km de portée

Discussion dans 'Webzine - actualité des luttes et partage d'articles de presse' créé par Ungovernable, 9 Novembre 2009.

  1. L’annonce d’un tir d’essai par le Hamas d’une roquette de 60 km de portée a déclenché en Israël une nouvelle poussée de fièvre belliqueuse. La presse est remplie de manchettes apocalyptiques, les généraux et les experts militaires se succèdent à la TV, et la question n’est plus si mais quand aura lieu la prochaine confrontation. Atterré par ce climat de veillée d’armes, Gideon Levy se réfugie dans l’ironie cinglante et dénonce l’aveuglement d’un establishment militaire et médiatique qui se refuse à poser la seule question qui vaille : pourquoi ?


    par Gideon Levy, Haaretz, 5 novembre 2009
    A intervalle régulier de quelques semaines il faut semer la peur, à intervalle de quelques mois il faut proférer des menaces, et tous les deux ans ou moins, il faut une petite guerre. En étroite coopération, l’armée et les médias promettent une nouvelle série de combats. Ainsi, il serait possible d’échapper en partie au blâme du rapport Goldstone et de se complaire dans le rôle que nous apprécions le plus : être la victime, se sentir menacé et se réunir face au grand danger extérieur prétendument à l’horizon.
    L’armée israélienne sera alors au zénith et se purifiera de ses doutes et de ses échecs. Cela peut aussi se traduire par d’énormes budgets, un regain d’importance, de gloire et d’influence à la fois pour les généraux et les commentateurs militaires. Cela génère également de bons taux d’écoute et permet de vendre des journaux à sensation et des systèmes d’armes avancés. Que pouvons-nous espérer de mieux ?


    Voici le dernier cri d’alarme : la NASA en Palestine ! L’équivalent du système Rafael de Défense Avancée à Gaza ! Le Hamas lance une fusée iranienne - elle doit être iranienne - à 60 kilomètres. Le directeur du renseignement militaire en a fait état, le Premier ministre Benjamin Netanyahu a parlé immédiatement de systèmes de missiles, et les médias ont tout de suite entamé leur danse de guerre préférée. « Trois millions de citoyens dans la zone de tir », « Confrontation en Décembre », « Êtes-vous à portée de tir ? » « La périphérie de Tel Aviv en danger », « Armes de l’Apocalypse » - Des Unes effrayantes accompagnées de cartes non moins effrayantes. « C’est une nouvelle dimension que doit affronter l’armée israélienne. Ce n’est pas une mince affaire. C’est vraiment une autre dimension. Nous devons nous rappeler qu’il y aura de nombreuses victimes sur le front intérieur », rugit le baryton national - le commentateur militaire de la télévision.


    Une fois encore, nous sommes aux prises avec le grotesque - une mince bande de terre en état de siège sombrant dans la détresse et les ruines, avec une organisation paramilitaire dont le pitoyable arsenal ferait la honte d’un camp d’entraînement de base de l’armée. Et qui a déjà prouvé son peu d’efficacité durant la dernière guerre. Mais ces militants nous sont dépeints comme une superpuissance. Voilà comment ils créent le scénario pour la prochaine guerre. C’est ainsi qu’ils renforcent non seulement l’ennemi, mais d’abord et avant tout l’armée qui peut abattre cet ennemi.


    Les commentateurs militaires belliqueux annoncent que la guerre surviendra rapidement, peut-être même dès le mois prochain. Leurs prédictions furieuses seront une nouvelle fois des prophéties auto-réalisatrices. De la même façon que lors des horribles séquences précédentes, nous pouvons maintenant nous attendre à une série d ’ « incidents » qui « réchauffent le front » - le bombardement d’un tunnel ou d’un atelier de fabrication d’armes. Quelques paysans désarmés qui osent s’approcher de la clôture de sécurité, poussant leurs charrues rouillées, seront tués après avoir été dépeints comme des terroristes portant des explosifs, et les Palestiniens tireront quelques Qassam en réponse, semant la peur dans le Néguev et faisant monter la pression sur le gouvernement pour qu’il « fasse quelque chose. »
    « Les hauts gradés ne se demandent pas s’il y aura une confrontation militaire avec le Hamas, mais quand », dit le cliché au sujet de la prochaine guerre. Mais bien sûr, la seule question qui compte n’est pas posée : « Pourquoi » et non pas « si » ou « quand ».


    Cela pourrait être drôle si ce n’était pas si déprimant. Même une satire ne serait pas aussi ridicule que cette réalité sans cesse renaissante. Aucune leçon n’est tirée. Un millier de commissions d’enquête ne nous épargnerons pas cette marche folle. Gaza est sous les verrous et reste calme, relativement parlant. Mais elle ne restera pas tranquille si le siège n’est pas levé et si ses hanitants ne sont pas autorisés à bénéficier de conditions de vie décentes. Ceux qui veulent une nouvelle guerre inutile et criminelle en décembre sont invités à se joindre à cette célébration de la folie qui nous gagne, orchestrée par les barons de la guerre - les généraux et les commentateurs de la TV.


    Ceux qui veulent essayer d’arrêter ce cercle vicieux sont les bienvenus, afin de trouver une alternative : la levée immédiate du siège, la réhabilitation de la bande de Gaza, la libération de Gilad Shalit en payant le prix demandé, un effort pour amener le Hamas à participer au processus de paix et une tentative de parvenir à un accord à long terme avec lui. C’est possible, mais cela n’a jamais été essayé. Reste cependant un hic. Que feront les généraux et les commentateurs si, à Dieu ne plaise, le sud reste calme ?
     
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