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L'experience de Stanford

Discussion dans 'Politique et débats de société' créé par zarkax, 10 Août 2011.

  1. zarkax
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    zarkax GANGNAM STYLE Membre actif

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    L’expérience de Stanford (effet Lucifer) est une étude de psychologie expérimentale menée par Philip Zimbardo en 1971 sur les effets de la situation carcérale. Elle fut réalisée avec des étudiants qui jouaient des rôles de gardiens et de prisonniers. Elle visait à étudier le comportement de personnes ordinaires dans un tel contexte et eut pour effet de montrer que c'était la situation plutôt que la personnalité des participants qui était à l'origine de comportements parfois à l'opposé des valeurs professées par les participants avant le début de l'étude. Les 18 sujets avaient été sélectionnés pour leur stabilité et leur maturité, et leurs rôles respectifs de gardiens ou de prisonniers leur avaient été assignés ostensiblement aléatoirement. En d'autres termes, chaque participant savait que l'attribution des rôles n'était que le simple fruit du hasard et non pas de prédispositions psychologiques ou physiques quelconques. Un gardien aurait très bien pu être prisonnier, et vice-versa.

    Les prisonniers et les gardes se sont rapidement adaptés aux rôles qu'on leur avait assignés, dépassant les limites de ce qui avait été prévu et conduisant à des situations réellement dangereuses et psychologiquement dommageables. L'une des conclusions de l'étude est qu'un tiers des gardiens fit preuve de comportements sadiques, tandis que de nombreux prisonniers furent traumatisés émotionellement, deux d'entre eux ayant même dû être retirés de l'expérience avant la fin.

    Malgré la dégradation des conditions et la perte de contrôle de l'expérience, une seule personne (Christina Maslach) parmi les cinquante participants directs et indirects de l'étude s'opposa à la poursuite de l'expérience pour des raisons morales. C'est grâce à celle-ci que le professeur Zimbardo prit conscience de la situation et fit arrêter l'expérience au bout de six jours, au lieu des deux semaines initialement prévues.

    Les problèmes éthiques soulevés par cette expérience la rapprochent de l'expérience de Milgram, menée en 1963 à l'Université Yale par Stanley Milgram, un ancien camarade de classe de Zimbardo au lycée.


    Buts et méthodes : L'étude, financée par l'US Navy et l'US Marine Corps, visait à comprendre la raison des conflits dans leur système carcéral. Le professeur Zimbardo et son équipe ont voulu tester l'hypothèse selon laquelle les gardiens de prison et les prisonniers adoptaient spontanément par autosélection un comportement menant à une dégradation des conditions de détention. Les participants, recrutés par une annonce dans un journal, étaient payés 15 $ par jour (ce qui représenterait 75 $ en 2007) pour participer à une "simulation de prison" d'une durée de deux semaines. Parmi les 70 candidats s'étant présenté, les tests psychologiques et physiques permettent à Zimbardo et son équipe de sélectionner 24 adultes en bonne condition physique et mentale. Ces participants sont tous des étudiants, originaires de tout le continent nord américain, et issus de tous les milieux .

    Les candidats furent divisés de manière aléatoire en deux groupes de taille égale, les « prisonniers » et les « gardiens » ; ils sont, de plus, tous parfaitement informés du caractère aléatoire de la répartition des rôles.

    La prison se situait dans le sous-sol du bâtiment de psychologie de l'Université Stanford. Un assistant de recherche jouait le rôle de directeur et Zimbardo celui de superviseur. Zimbardo imposa des conditions particulières aux participants dans l'espoir d'augmenter la désorientation, la dépersonnalisation et la désindividualisation.

    On fournit aux gardes une matraque en bois et un uniforme kaki de type militaire acheté dans un magasin de surplus. Ils avaient également des lunettes de soleil réfléchissantes (comme celles des policiers américains et de certains gardiens de prison) pour éviter tout contact entre les yeux d'un prisonnier et ceux d'un gardien. Contrairement aux prisonniers, les gardes étaient censés travailler en rotation et rentrer chez eux lorsqu'ils n'étaient pas de service, bien que par la suite nombre d'entre eux aient été volontaires pour du travail supplémentaire sans augmentation de salaire.

    Les prisonniers devaient porter une sorte de longue blouse, pas de sous-vêtements, et portaient des tongs en caoutchouc, ce qui, selon le professeur Zimbardo, devait les forcer à adopter des postures inhabituelles et à éprouver une sensation d'inconfort pour pousser leur désorientation. Ils étaient appelés par des numéros et non par leur nom. Ces numéros étaient inscrits sur leurs uniformes et ils devaient porter un bas nylon sur le haut de la tête pour simuler un crâne rasé (comme à l'armée). De plus, ils portaient une chaîne aux chevilles, pour leur imposer en permanence le sentiment de leur emprisonnement et leur oppression.

    La veille de l'expérience, les gardes assistèrent à une réunion de formation, mais ne reçurent nulle consigne formelle, sinon qu'aucune violence physique n'était autorisée. Ils furent avertis que le bon fonctionnement de la prison était de leur responsabilité, et qu'ils devaient la gérer de la manière qui leur conviendrait.

    Zimbardo fit cette déclaration aux gardes durant la formation :

    « Vous pouvez créer chez les prisonniers un sentiment d'ennui, de peur jusqu'à un certain degré, vous pouvez créer une notion d'arbitraire par le fait que leur vie soit totalement contrôlée par nous, par le système, vous, moi, et ils n'auront aucune intimité... Nous allons faire disparaître leur individualité de différentes façons. En général, tout ceci mène à un sentiment d'impuissance. Dans cette situation, nous aurons tout le pouvoir et ils n'en auront aucun. »


    Les participants désignés comme prisonniers furent simplement prévenus d'attendre chez eux pour être appelés quand l'expérience commencerait. En fait, ils furent arrêtés pour vol à main armée, sans être prévenus, par la police de Palo Alto qui coopérait à cette partie de l'expérience.

    Les prisonniers durent passer par une procédure de "fichage" complète, incluant la prise des empreintes digitales, les photographies et la lecture de leurs droits. Ils sont fouillés, menottés puis conduits à la prison factice en véhicules de police, à grand renfort de sirènes. Arrivés à destination, ils sont déshabillés et nettoyés à l'aide de produits anti-poux et parasites, puis on leur indique leur nouvelle « identité ».

    Résultats : Le contrôle de l'expérience a rapidement été perdu. Les prisonniers ont subi - et accepté - un traitement humiliant et parfois sadique de la part des gardes, et à la fin beaucoup d'entre eux souffraient d'un sévère dérangement émotionnel.

    Après un premier jour plutôt calme, une émeute survint le deuxième jour. Les gardes se portèrent volontaires pour des heures supplémentaires et collaborèrent pour casser la révolte, attaquant les prisonniers avec des extincteurs sans être supervisés par l'équipe de recherche. Après cela, les gardes essayèrent de diviser les prisonniers et de les monter les uns contre les autres en créant une "bonne" cellule et une "mauvaise" cellule. Cela devait laisser penser aux prisonniers qu'il y avait des "informateurs" dans leurs rangs. Ces efforts furent largement récompensés, puisqu'il n'y eut plus de grande rébellion. D'après les anciens détenus engagés comme consultants par le professeur Zimbardo, une technique similaire avait été utilisée avec succès dans les vraies prisons aux États-Unis.

    Le "comptage de prisonniers", qui avait été mis en place pour que les prisonniers se familiarisent avec leur numéro d'identification, devinrent des épreuves où durant plusieurs heures les gardes tourmentaient les prisonniers et leurs imposaient des punitions physiques, notamment de longues périodes d'exercice physique forcé. Cette prison devint insalubre et inhospitalière ; le droit d'utiliser la salle de bain devint un privilège qui pouvait être - et était souvent - refusé. Certains prisonniers furent forcés de nettoyer les toilettes à mains nues. Les matelas furent retirés de la "mauvaise" cellule et les prisonniers obligés de dormir à même le sol sans aucun vêtement. La privation de nourriture était également souvent utilisée comme punition. De plus, les prisonniers durent endurer une nudité forcée et même des actes d'humiliation sexuelle.

    Le professeur Zimbardo lui-même fut victime de son expérience. Le quatrième jour, Zimbardo et les gardes réagirent à une rumeur d'évasion en essayant de déplacer toute l'expérience dans une cellule non utilisée du département de police local, car cela était "plus sûr". La police refusa, invoquant des problèmes d'assurance, et le professeur Zimbardo se rappelle avoir été énervé et avoir pesté contre le manque de coopération de la police.

    L'expérience avançant, de nombreux gardes devinrent progressivement plus sadiques, en particulier la nuit (pensant que les caméras étaient éteintes et que l'équipe de recherche ne pouvait pas les voir). Les cobayes déclarèrent qu'environ un tiers des gardes présentaient de vraies tendances sadiques.

    Pour étayer sa théorie selon laquelle les participants avaient intériorisé leur rôle, le professeur Zimbardo avança le fait que lorsqu'on leur proposa une liberté conditionnelle en échange de la confiscation de la totalité de leur paye, la plupart des détenus acceptèrent. Puis, lorsque leur liberté conditionnelle fut néanmoins refusée, aucun ne quitta l'expérience. Le professeur Zimbardo avance qu'il n'y avait aucune raison pour eux de continuer à participer à l'expérience s'ils étaient prêts à renoncer à leur salaire pour la quitter.

    Les prisonniers ont commencé à présenter des symptômes de dérangements émotionnels aigus, et l'un d'eux développa un eczéma psychosomatique sur tout le corps quand il apprit que sa demande de liberté conditionnelle était rejetée (le professeur Zimbardo la lui avait refusée, pensant qu'il tentait de sortir de l'expérience en feignant la maladie). Pleurs incontrôlables et pensées désordonnées étaient devenus communs chez les prisonniers. Deux d'entre eux souffraient de troubles si importants qu'ils durent être écartés de l'expérience et remplacés par d'autres cobayes.

    L'un des remplaçants, le prisonnier 416, était horrifié par les traitements infligés par les gardes et commença une grève de la faim pour protester. Il fut isolé et enfermé de force dans un placard pendant trois heures. Pendant ce temps, les gardes lui firent tenir les saucisses qu'il avait refusé de manger. Les autres prisonniers le considéraient comme un agitateur. Pour exploiter ce sentiment, les gardes offrirent un choix aux prisonniers : s'ils n'abandonnaient pas leur couverture, le prisonnier 416 serait laissé en isolement toute la nuit. Les prisonniers choisirent de garder leur couverture. Plus tard, le professeur Zimbardo intervint et replaça le prisonnier 416 dans sa cellule.

    Le professeur Zimbardo décida de mettre fin à l'expérience plus tôt lorsque Christina Maslach, une ancienne étudiante diplômée qu'il fréquentait à l'époque (et qui devint plus tard sa femme) s'insurgea contre les conditions épouvantables de la "prison" après qu'elle y eut pénétré pour interviewer les prisonniers. Le professeur Zimbardo nota qu'elle fut la seule, parmi la cinquantaine d'intervenants entrés dans la "prison", les amis et membres de la famille autorisés à visiter les sujets, les psychologues professionnels, les étudiants de second cycle en psychologie, le prêtre et le protecteur du citoyen, à mettre la moralité de l'expérience en question. Après seulement six jours sur les deux semaines prévues, l'expérience fut interrompue.

    Conclusions :L'expérience de Stanford s'est terminée le 20 août 1971. Le résultat de l'expérience a été utilisé comme argument pour démontrer l'impressionnabilité et l'obéissance des gens en présence d'une idéologie légitime et d'un support institutionnel et social.

    En psychologie, les résultats de l'expérience sont censés étayer la thèse d'un comportement en fonction des situations et non des prédispositions (notamment génétiques) des individus. En d'autres termes, il semble que la situation provoque le comportement des participants plus que quoi que ce soit d'inhérent à leur personnalité individuelle. En ce sens, les résultats de l'expérience corroborent ceux de la célèbre expérience de Milgram, dans laquelle des gens ordinaires administraient, sous l'ordre d'un professeur, ce qui leur était présenté comme des chocs électriques dangereux à un complice des expérimentateurs.

    Peu après que l'étude eut été terminée, de sanglantes révoltes éclatèrent à la fois dans la Prison d'État de San Quentin et d'Attica (Émeutes de la prison d'Attica), et Zimbardo présenta ses résultats à la commission américaine sur la justice

    Il existe 2 films sur cet expérience :

    The experiment (2010) et l'exprience (2001)




    http://www.torrent411.com/torrents/L-EXPERIENCE_fr_dvdrip_pekpok2

    http://www.torrent411.com/torrents/The.Experiment.2010.TRUEFRENCH.DVDRIP.XViD-FiCTiON_up_doudou13001
     
  2. Anarchie 13
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    Anarchie 13   Comité auto-gestion Membre actif

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    J'en ai entendu parlé. Par contre elle a été pas mal controversé, notamment à cause des conditions de l'expérience, ils disaient que ça ne la rendait pas objective. Mais je pense quand même que si. :ecouteurs:
     
  4. Sullivan
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    Sullivan Glandeur rêveur Membre actif

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    Ouai je "connaissais" si l'on peut dire (déjà lu l'article quoi). C'est assez peu étonnant, et plutôt déprimant..
    Dans le même genre y'a l’expérience Milgram.
     
  6. zarkax
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    zarkax GANGNAM STYLE Membre actif

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    Cette experience fait un parrallèle en faisant jouer les 2 rôles ( le faux savant et le cobaye ) de l'experience milgram par 2 cobayes. Les films sont assez bien réussi, enfin celui de 2001 surtout .
     
  7. niark-niark
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    niark-niark Une clope? Membre actif

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    Chaud !
    Comme si dès qu'on pouvait avoir un sentiment de supériorité on l'exploitait...
     
  9. Anarchie 13
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    Anarchie 13   Comité auto-gestion Membre actif

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    Exactement.
     
  11. zarkax
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  12. Sullivan
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  13. libertaire
    Je viens de me souvenir, un faux jeu télé avait été organisé et diffusé en France, sur France 3 je crois mais je suis pas sur, reprenant le principe de l'expérience Milgram, ça doit être possible de le retrouver sur le net. Je l'avais pas vu, mais parait que c'était assez effarant, et que les résultats confirmaient (voir empiraient) ceux de l’expérience originelle.
     
  14. headskin
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    headskin Geek Membre actif

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    niark-niark Une clope? Membre actif

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  17. libertaire, anarchiste, féministe, auto-gestionnaire, chaos/Nihiliste, progressite
    Oui je me souviens. C'était une histoire où le mecs qui subissait les décharges était un comédiens? Y en avait même un qui avait été jusqu'à la dose mortelle.
     
    Dernière édition par un modérateur: 12 Août 2011