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Fonctionnements d'organisations et structures sociales

Discussion dans 'Activisme, théories et révolution sociale' créé par Victors, 8 Mars 2023.

  1. Victors
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    Victors Nouveau membre

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    Mar 2023
    Homme
  2. socialiste, internationaliste
    Bonjour chers camarades.

    J'ai peut-être mal cherché dans le forum, auquel cas je vous demande pardon pour la gêne occasionnée, mais je cherche à connaître et comprendre des fonctionnements d'organisations et structures sociales, qu'elles soient théoriques et/ou pratiques, à échelle réduite ou non.
    Des structures sociales se voulant totalisantes c'est à dire avec un système de santé, de logement, d'apport/production de nourriture, gestion des besoins etc.
    Une description détaillée des mécanismes, des problèmes que l'on tente de résoudre, que l'on rencontre, une vision précise des choses.

    Est-ce que vous avez des articles, des études, des passages précis de livres ou simplement une discussion détaillée (ici ou ailleurs) qui aborde des problématiques structurelles et techniques ?

    Merci beaucoup pour votre aide, je vous souhaite une agréable journée.

    (J'ai cru comprendre que certaines personnes préfèrent ne pas trop théoriser l'organisation, qu'elles préfèrent les voir émerger.
    Même dans ce dernier cas j'ai l'impression que cela nécessite quand même des stratégies de conditions d'émergence ? (je me trompe peut-être). Mais même si je comprends l'argument et que je l'envisage comme possibilité, ça n'est pas mon angle d'approche ici.
    Que l'on retienne ou non comme stratégie pertinente de théoriser l'organisation, il me semble intéressant d'explorer cette piste, ne serait-ce que pour comprendre certains écueils à éviter ou autre. C'est mon sentiment actuel.)
     
  3. Roaringriri
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    Roaringriri Membre du forum Compte fermé Membre actif

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    Fev 2023
    Homme , 73 ans
  4. anarchiste, anarcho-communiste, révolutionnaire
    Comme personne ne répond, je m’y colle, mais attention, il ne s’agit que de ma vision du monde et ça n’engage que moi et éventuellement mes proches.

    Nous sommes confrontés, à deux visions du monde, concurrentes, complices, et indissociables:
    Le Principe Economique, et le Principe Bureaucratique.


    L’idéologie économique confie à la rapacité, le soin de concevoir de quoi identifier, définir et satisfaire les besoins.

    C’est une superstition, autant qu’un mode d’organisation des productions et des échanges, par ce que l’économie superpose, et impose, ses règles propres, aux règles et aux tabous humains, et l'humain est réduit au rôle de pion dans le jeu de la marchandise.
    Et bien évidement la vision économique, ne considère comme des « besoins », que ce qui est « rentable ».


    L’idéologie politique, affirme elle, que l’Organisation et la soumission à des Lois, sont des bases, qui peuvent et doivent, remplacer l’intelligence et l’initiative individuelle et collective.

    La Loi (expression temporaire d’un rapport de force social- selon Bakounine) et la Norme, remplacent les Tabous.
    Et immédiatement créent des prohibitions, qui permettent au Crime Economique Organisé, de créer des « marchés » ultra rentables et non taxés.


    Les noces de ces deux fantasmes, ont accouché de pleins de formes, apparemment différentes, de justifications des superstructures bureaucratiques, économiques et politiques, qui prétendent se situer entre deux archétypes: Le Libéralisme, partisan du pouvoir absolu de l’économie, et le Fascisme, partisan du pouvoir absolu de l’Etat.

    Dans la pratique ces deux archétypes, ne sont pas si opposés que ça, contrairement à ses affirmations, le Libéralisme ne veut pas du tout, se débarrasser de l’Etat, mais juste le privatiser.
    Et le Fascisme, qui doit faire les yeux doux à l’Economie pour survivre, se transformant progressivement en National Libéralisme.

    Ces archétypes étant impraticables, et le plus souvent inavouables ou chargés d’histoire, dans le cadre qu’ils définissent, les bureaucraties politiques, ont imaginé des variantes, qu’on a pris en France, l’habitude de situer de « droite » à « gauche », selon leur zone de chalandise électorale.
    
Les déclarations d’intentions sont une chose, les pratiques réelles en sont une autre, et il est devenu très difficile de distinguer à l’usage, les pratiques réelles des camps opposés.

    La sincérité s’use rapidement, et la structure mixte de l’Etat, Politique et Economique, ramène les plus enthousiastes au « réalisme ».

    Le Marxisme, et ses différentes écoles issues de la social démocratie, ont dès leur début, confié au capitalisme, le soin de développer les « forces productives », et de sortir du règne de la pénurie.
    En théorie, le socialisme prétend pouvoir utiliser l’Etat, pour contrôler l’Economie.

    Il a cru et croit toujours, pouvoir dompter le fauve économique, et obtenir de lui, la satisfaction de besoins, non immédiatement générateurs de profits.
    
Dans la pratique ont sait bien que le fauve a toujours fini par dompter ses dompteurs.

    A l’opposé des « socialistes », on trouve les « Libéraux », qui eux nient le rôle « régulateur » de l’Etat, et confient à l’Economie le soin de tout régler, laissant à l’Etat le soin d’organiser l’ordre et la répression.

    Ces deux fausses pistes, et toutes les nuances entre les deux, sont basées sur une fiction, celle de l’indépendance, des deux Principes, Economique et Bureaucratique, alors que toute notre histoire prouve, au contraire, leur profonde interpénétration.

    Cette double gouvernance implicite, a permis l’extension du Capitalisme sur toute la planète, et un développement technologique, auquel on n’aurait même pas rêvé il y a un siècle.
    
Le tout bien sur, passant par l’écrasement des réticents ou des « inutiles », et la mise en coupe réglée de la planète.


    Jusqu’à présent, c’est dans ce pandémonium que l’anarchisme a essayé de défendre ses idées ou de les mettre en pratique.

    Les pistes pour éviter de mettre les deux pieds là dedans, sont forcément minuscules.

    Il y a deux façons de se planter, l’une passe par la pureté et l’isolement criticiste, et l’autre par son inverse l’activisme tous azimuts, qui pour exister, sur le « marché » de la contestation, préfère faire rien, que ne rien faire.

    Ce qui complique encore la situation, c’est qu’on n’a aucun recul, et qu’évoquer la gloire d’une ancienne défaite, pour justifier une position présente ne sert qu’à se rassurer.

    Cette longue digression, n’était pas faite pour éviter de te répondre, mais juste pour préciser la complexité de ta question.


    L’anarchisme a proposé, et parfois essayé de mettre en pratique, plusieurs solutions qui étaient sensées permettre de réaliser, ou a minima d’avancer, vers une organisation sociale libertaire.
    
Mais de ses racines prolétariennes, il a toujours considéré qu’une des premières clefs du problème, était la disparition de la pénurie, (« aucun homme ,ne peut manger plusieurs poulets par jour »).

    C’est clairement de l’angélisme, la « richesse » ne peut exister que s’il y a des « pauvres », quel que soit le nombre de poulets dans sa réserve.
    
C’est ce préalable d’un appel à la conscience humaniste, que Marx a dénoncé chez Proudhon, lui opposant le mécanisme implacable de développement du Capitalisme.

    Cette critique était parfaitement justifiée, mais elle portait en germe tous les renoncements ultérieurs du marxisme.

    Proudhon avait raison d’avoir tort, et Marx tort d’avoir raison.

    Cette égalité des contradictions, est la base même de la logique de Proudhon, mais c’est totalement insoluble, dans la dialectique marxo-hegellienne.

    La pénurie n’existe plus, sauf là ou elle est fabriquée, nos capacités de production sont 10 fois supérieures à la satisfaction des « besoins » de l’humanité, pire encore 90% de ce que nous produisons n’a pas le moindre intérêt, et n’existe que pour faire tourner la machine.
    
Et contrairement à toutes les espérances anarchistes et marxistes, ça n’a strictement rien changé, aux inégalités et à la misère.
    
Proudhon et Marx se sont plantés.



    Alors comme il est impossible de courir en trainant autant de boulets philosophiques, certains ont tenté des « trucs ».

    J’en connais un (de près), qui au milieu des années 70 a décidé de laisser tomber sa formation de physicien, et de monter une entreprise (à l’origine, une sérigraphie), pratiquant le salaire unique, la prise de décision, la plus collective possible et la non rétribution du Capital.

    Cette dernière exigence étant la plus facile à résoudre, par ce de Capital, il n’y avait pas.

    Cette boite a réuni quelques uns des membres d’un groupe anar étudiant, et des membres de la CNT locale, soit un plâtrier et un cuisinier.


    46 ans après, et de multiples péripéties, cette boite existe toujours, et fonctionne enfin, a peu près correctement.

    Je viens de commencer à la quitter, 10 ans après ma retraite officielle, je n’y vais désormais plus qu’un jour ou deux par semaine.
    
On a créé un ilot de socialisme libertaire ( interne), d’un effectif moyen de 10 à 15 salariés, qui a concerné un total d’un peu plus de 100 personnes et leurs familles sur 46 ans.

    Au bout de 46 ans (une vie) je suis incapable de tirer un bilan de ça.

    J’ai gardé mon cul propre, je n’ai été ni un exploiteur, ni un exploité.

    J’y ai gagné une certaine connaissance du Capitalisme, et beaucoup de cynisme.
    
Mais je suis usé, et je n’ai rien changé au monde.

    Je suis devenu grand-père et en ce moment, je m’occupe le plus souvent possible de ma petite fille, elle est encore toute petite et apprend des trucs tous les jours, mais je crois que je ne lui parlerai jamais de tout ça.






    Ca ne réponds en rien à ta question ...
    Mais attendais tu vraiment une réponse sous forme de mode d'emploi ?
     
  5. anarch
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    anarch Membre du forum

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    Mar 2023
    Homme , 30 ans
  6. libertaire, anarchiste, auto-gestionnaire, synthèsiste, anti-fasciste, anti-autoritaire
    Je ne sais pas si l'endroit est bien choisi auquel cas je retirerai mon message (peut-être un message MP pour Roaringriri serait plus adapté, mais ça répond au message précédent...)

    Plusieurs choses.

    1) La manière dont tu le dis semble assez négative, alors que bien que vous n'ayez pas réussi à globaliser l'anarchie (ou socialisme libertaire, ici), qui est une lutte difficile, vous avez quand même pu vivre une expérience véritablement libertaire (avec 100 personnes et leurs familles!), je le penserai plutôt comme une chance, et une source d'inspiration. Beaucoup d'autres personnes souffrent, c'est sûr, mais ça en tant que militant ça peut venir en complément de la lutte "classique" et autres. Je déprime souvent par la difficulté de ses luttes, pour la souffrance des autres, mais je m'imagine peut être que vivre une expérience libertaire comme celle-ci pourrait davantage me motiver, bien que le contexte général soit tout de même déprimant

    2) Sachant que vous avez monté votre boîte en collectif en lien avec des membres de la CNT, vous n'avez pas pu vous constituer un réseau avec d'autres membres de la CNT qui auraient pu monter d'autres boîte, ou bien même qui soit membre d'entreprise coopérative même à tendance libertaire lointaine ?
     
  7. Roaringriri
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    Roaringriri Membre du forum Compte fermé Membre actif

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    Fev 2023
    Homme , 73 ans
  8. anarchiste, anarcho-communiste, révolutionnaire
    Je me suis trop impliqué là dedans, et ne suis pas très bien placé pour fournir une réponse « objective ».
    
D’abord, je n’ai jamais eu vraiment l’impression d’avoir eu le choix, j’ai toujours bossé, y compris quand j’étais en fac, et je ne voyais pas continuer comme ça.

    Quelle que soit les particularités, l’autogestion, à l’intérieur d’un système capitaliste, c’est l’intériorisation du Principe Economique, et une acceptation minimale du Principe Bureaucratique.

    Le Capitalisme se fout totalement, du discours et de la pratique interne des boites, si elles acceptent ses règles et ses contraintes.
Tu peux très bien tenir un discours anarchiste, dans un syndicat patronal, sans causer le moindre trouble.

    A partir du moment ou tu ne cherches pas à imposer ou répandre tes pratiques, c’est tout à fait toléré, comme est de la même façon totalement toléré, un discours absolument réactionnaire.

    Les contraintes externes, gouvernent au final, qu’elles soient financières ou commerciales, et on les intériorise, même si on supprime la prédation interne.

    Ce qui conditionne la survie d’une boite, c’est son adaptation à son « marché ».

    Dans le pire des cas, on confie d’ailleurs les secteurs totalement non rentables, à des coopératives, dont les membres vont se défoncer, ce qui va permettre d’avoir un délai de confort, pour trouver un fournisseur délocalisé, sans être obligé d’immobiliser du Capital, pour un rendement nul ou trop faible.

    Pour compenser ça, les coopérateurs doivent être « meilleurs », que des salariés employés.

    Ce qui veut dire, qu’il vont fournir un travail plus efficace, pour pas cher, alors qu’un patron, aurait du payer beaucoup plus pour la même chose.

    Je caricature, mais c’est à peu près ça.
    
On obtient, avec l’autogestion, plus d’implication, qu’avec le salariat « normal ».

    Maintenant, on peut voir ça comme une gymnastique, un entrainement.
    Si on prétend que les « patrons », les actionnaires, les banquiers et l’Etat, sont inutiles, autant s’entraîner à les rendre vraiment inutiles, en se passant d’eux.
    
Mais si c’est pour finir par imposer « presque » la même chose qu’eux, c’est une perte de temps.

    Une des clefs de tout ça, c’est la conception même de l’Economie.

    Nous sommes depuis longtemps dans une situation d’abondance productive, et la plus grosse partie de ce que nous fabriquons ne sert strictement à rien.
    
En autogestion, ou non, nous travaillons, pour produire et faire circuler de la valeur ajoutée, venant de fabrications parfaitement inutiles.

    Et ce sont les contraintes nées de la création et du maintien de ces flux, parfaitement idiots, que nous subissons, à travers le « travail », ou la soumission politique.

    Dans la boite en question, on a toujours fait gaffe ou du moins essayé, de ne pas s’intégrer au suicide concurrentiel, on a développé de « nouveaux » produits, de « nouvelles » techniques ou des pratiques commerciales marginales. 

    Mais ce genre de marginalité ne dure pas, si une véritable rentabilité capitalistique apparaît, tu ne reste pas seul bien longtemps.

    On a eu pas mal de turnover, tant qu’on n’a pas pu, proposer des conditions meilleures que les autres boites d’un secteur équivalent.

    Les emmerdes extérieurs, finissaient pas causer des emmerdes intérieurs.

    On intériorise même ça.

    Depuis que cette boite à cumulé un niveau de fonds propres suffisant, on peut à peu près tout amortir de ces contraintes. 

    On bosse beaucoup moins, et on est mieux payé, mais on doit toujours faire gaffe de ne pas perdre notre relative avance.

    Mais tout ça n’a rien « d’anarchiste », ce sont juste des compromis.
    Juste une remarque sur l'essaimage, au début on rêvait de proposer une poly-activité, notamment agricole, pour être le plus autonome possible, c'est très compliqué, les compétences universelles n'existent pas, et il faut absolument pouvoir dégager de gros excédents sur une activité, pour financer celle qui est le moins rentable.
    On n'a jamais eu suffisamment de fric pour ça, et il y a, de plus, un véritable barrage légal contre ça.
    Ca existe, mais très vite les "spécialistes" apparaissent et ça devient très compliqué.
     
    Elicec apprécie ceci.
  9. Elicec
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    Elicec Membre du forum Membre actif

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    Déc 2016
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  10. anarchiste, anarcho-féministe, féministe, situationniste, révolutionnaire, anti-fasciste, anti-autoritaire
    Salut, quelques livres d'où tu pourras dégager quelques réponses:

    Quelques pistes intéressantes dans l'essai de Saul Alinsky, (Rules for radicals) : "Etre radical. manuel pragmatique pour les radicaux réalistes". Alinsky y présente un ensemble de règles pour les activistes et les organisateurs communautaires, basées sur ses années d'expérience dans la lutte pour les droits civiques et la justice sociale. Les règles comprennent des conseils pratiques pour mobiliser les gens, construire des coalitions, cibler les dirigeants, utiliser les médias et créer des perturbations non violentes. Le livre de Alinsky a été critiqué par certains pour son utilisation de la manipulation et de la confrontation pour atteindre des objectifs politiques. Mais ses méthodes ont été efficaces pour mobiliser les communautés défavorisées et marginalisées pour lutter contre l'injustice.
    C'est un livre déterminant pour ceux qui cherchent à comprendre l'organisation des mouvements sociaux et politiques et comment ils peuvent mobiliser les gens pour créer un changement social.

    Tu peux y ajouter:

    "L'Anarchie expliquée à mon père" de Francis Dupuis-Déri - : explore les principes de l'anarchisme et la façon dont ils peuvent être appliqués pour créer une société plus équitable et autogérée.

    "Utopies réalistes" de Rutger Bregman - Ce livre propose une vision prometteuse de la façon dont la société pourrait être organisée de manière à ce que les besoins fondamentaux de chaque personne soient satisfaits.

    "Communes, Communalisme et Écologie sociale" de Murray Bookchin - Ce livre explore l'idée de la "commune", qui est une forme de communauté autogérée qui se concentre sur la production et la distribution équitables des ressources.

    "La Démocratie participative" de Yves Sintomer - Ce livre examine comment les citoyens peuvent être impliqués dans la prise de décision politique, en se concentrant sur des exemples concrets de démocratie participative à travers le monde.

    "Le modèle économique des coopératives" - Ce livre examine le fonctionnement des coopératives, qui sont des organisations détenues et gérées par leurs membres, et qui se concentrent sur la satisfaction des besoins de leurs membres plutôt que sur la réalisation de profits.

    Et "Food Not Bomb" de Keith McHenry et de C. T. Lawrence Butler, passionnant manuel d'organisation de cantine dans les quartiers, du concret pour la grève générale.
     
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