Chargement...
  1. Pour consulter le Webzine : https://www.libertaire.net/articles

Actualité militante Mouvement "Puerta Del Sol" en France

Discussion dans 'Webzine - actualité des luttes et partage d'articles de presse' créé par Ungovernable, 26 Mai 2011.

  1. Partout en France, les Indignés de la Puerta Del Sol ont fait des émules. A Paris, la place symbolique de la Révolution française sert de point de point de départ à la contestation.

    Ni syndicat. Ni parti. Ceux qu'on appelle déjà "les indignés de la Bastille" relaient à Paris le mouvement espagnol de la Puerta Del Sol. Depuis vendredi, avec autant de volonté que leurs modèles et malgré leur petit nombre, ils tentent de rassembler, sans mot d'ordre précis.

    11h30 mercredi. Place de la Bastille. Ils sont une dizaine à se rejoindre ce matin, pour la plupart étudiants. Espagnols et Français confondus. Ils montent, tranquillement leur stand d'information. De simples tréteaux de bois sur lesquels ils installent tracts, coupures de presse et banderoles de fortune. Marqué à l'encre blanche, le sol conserve les stigmates des nuits précédentes: le nom du mouvement "Démocratie réelle maintenant" côtoie les "Indignez-vous!" et "Tu es à genoux, lève-toi!"
    Les villes de France qui rassemblent
    Toulouse et Lyon réunissent chaque jour depuis une semaine entre 200 et 300 personnes. A Perpignan, un campement a été évacué Place de la République mais 130 personnes s'y rendent quotidiennement. Enfin, à Montpellier, une centaine de manifestants se retrouvent Place de la Comédie.

    Alors que sur la place madrilène, des dizaines de milliers de manifestants ont recrée un village alternatif, à Paris, ils sont chaque jour 300 à se réunir dès 19h devant les marches de l'opéra afin de "casser ce système sociétal" qui ne leur convient pas. "Ils" ne se revendiquent d'aucun parti, d'aucun syndicat et tiennent à affirmer une organisation spontanée sans leader, ni porte-parole. "Même si les gens ont du mal à y croire", sourit une étudiante française en anthropologie.

    "Pas de revendications particulières"

    "Nous n'avons pas encore de revendications particulières, nous exprimons un ras-le-bol général de la situation", martèle une étudiante espagnole. Présents sur la place, symbole historique de la Révolution, depuis vendredi dernier, ils ont tenté de reprendre le mouvement trans-pyrénéen en installant quelques tentes samedi, rapidement délogées. "Mais nous avons dormi là... sans tente", raconte cette même étudiante.

    Désireux de dépasser le cliché de l'étudiant révolté, celui qui a le temps de refaire le monde, quelques indignés vont distribuer leurs tracts informatifs à la Défense. Ils aimeraient que "les travailleurs de tous bords les rejoignent afin de trouver une réelle force de proposition", explique la jeune anthropologue.

    Les badauds s'approchent timidement du stand. Un jeune homme, t-shirt violet et large bermuda, les accueille, souriant. Les discussions s'envolent et certains rêvent d'une société nouvelle. Etonnés par le relais des journaux, ils prennent un tract et promettent de revenir.

    A l'image des révolutions arabes ou de l'indignation espagnole, le mouvement "Démocratie réelle maintenant" s'est répandu grâce au web. D'autres actions de ce type ont pris forme via Facebook et Twitter.

    Dimanche, dès 14h, ces Indignés à la française organisent un "grand rassemblement populaire". L'occasion, pour eux, de grossir les rangs.
     
  2. G 3org3
    Offline

    G 3org3 Membre du forum Membre actif

    256
    2
    1
    Déc 2010
  3. anarchiste, auto-gestionnaire
    ça me fait penser à quelques vers de Renaud à propos à propos des gens qui défilent Bastide-Nation...
     
  4. Tazon
    Offline

    Tazon Membre du forum Membre actif

    1 486
    2
    23
    Nov 2008
    France
    Symbolique merdique de la révolution jacobine-bourgeoise, il est plus que temps de dépasser ce cliché, il faut oublier cette "révolution" et la république ... Non ce n'est pas révolutionnaire de se réclamer de l'idéologie dominante mise en place y' a plus de 200 ans !
     
  5. Alter-Natif
    Offline

    Alter-Natif Nouveau membre

    2
    0
    0
    Juin 2011
    Contrairement aux blasés de la Révolution, je pense que ce mouvement ouvre une fenêtre d'espoir depuis longtemps close.

    D'autre part, l'actualité française concernant ce mouvement (pouvant devenir européen) est ridicule, et elle justifie à elle seule l'indignation. Alors j'aimerais savoir lorsque Anarchoi tu parles d'informations relayées par internet, quels sont tes sources. Que ceux qui ne peuvent participer directement au mouvement (Poitiers), puissent aussi jeter leur pavé dans la mare.

    Amis révolutionnaires, bonne journée!
     
  6. jeunevoleur
    Offline

    jeunevoleur Membre du forum Membre actif

    2 445
    3
    108
    Mar 2008
    [Barcelone] Un tract écrit et diffusé parmi les indignés de la place de Catalunya
    Posted on 10 juin 2011 by juralib

    « C’est la plus vieille spécialisation sociale, la spécialisation du pouvoir, qui est à la racine du Spectacle. Le spectacle est ainsi une activité spécialisé qui parle pour l’ensemble des autres. c’est la représntation diplomatique de la société hiérarchique devant elle-même, ou toute autre parole est bannie. Le plus moderne y est aussi le plus archaïque. »

    « Se relever. Relever la tête. Par choix ou par nécessité. Peu importe, vraiment, désormais. Se regarder dans les yeux et se dire qu’on recommence. Que tout le monde le sache, au plus vite. On recommence. Finis la résistance passive, l’exil intérieur, le conflit par soustraction, la survie. On recommence. En vingt ans, on a eu le temps de voir. On a compris. La démokratie pour tous, la lutte “anti-terroriste”, les massacres d’État, la restructuration capitaliste et son Grand Œuvre d’épuration sociale, par sélection, par précarisation, par normalisation, par “modernisation”. On a vu, on a compris. Les méthodes et les buts. Le destin qu’ON nous réserve. Celui qu’ON nous refuse. L’état d’exception. Les lois qui mettent la police, l’administration, la magistrature au-dessus des lois. La judiciarisation, la psychiatrie, la médicalisation de tout ce qui sort du cadre. De tout ce qui fuit. On a vu. On a compris. Les méthodes et les buts. Quand le pouvoir établit en temps réel sa propre légitimité, quand sa violence devient préventive et que son droit est un “droit d’ingérence”, alors il ne sert plus à rien d’avoir raison. D’avoir raison contre lui. Il faut être plus fort, ou plus rusé. C’est pour ça aussi qu’on recommence. »

    Avant, il y avait cette logique : s’organiser ou s’indigner. Désormais : s’organiser pour s’indigner. Nous disons : qui s’indigne attend encore de ce monde, pourtant déjà un souvenir ruiné. Qui fait attention à son image est déjà dans la force-de-travail. Esclave. Détruire le vieux monde en nous est le geste le moins spontané qui puisse être. Les intensités sont des vérités. Le monde n’est guère favorable aux vérités nouvelles. L’être isolé est le centre de ce monde en même temps que ses bordures, facilement déchirables. une foule d’êtres isolés également.

    Il n’y a pas de communisme sans abandon, d’abandon sans destruction et de destruction sans son possible matériel. Pas de communisme possible dans ces structures gestionnaires de l’acampada barcelonnaise. Certains disent : nous n’avons plus de Chef, plus d’Autorité sans voir comment ils font autorité avec le consensus et la paix. On se bat pour des idées, les mêmes que la Police. Toujours les mêmes entourloupes : l’AG pense qu’elle est souveraine du mouvement, garante des principes, affaires de bureaucrates. Est souverain celui qui organise le pouvoir, agence les temporalités, produit du mouvement. Non celui qui vote et s’égosille. Cette chimère volatile n’a d’autre pouvoir que celui d’approuver les questions techniques. Les questions techniques sont la mort du politique. La révolution a toujours été affaire de guerre, ceux qui le nient ont des cadavres dans la bouche et sont sans mémoires, autant dire, sans conscience historique. Pour destituer nos vies du capital, il faut se destituer de nos images et du langage commun des choses.

    Reprendre de là où nous ne sommes jamais partis avant : de Rien. Ceux qui coïncident avec leur époque et ses vérités sont ceux qui coïncident avec son bonheur. La première des guerres contre notre époque est la guerre diffuse contre sa forme de bonheur. Ceux qui veulent détruire un ordre ont inévitalement comme Ennemi les forces de l’Ordre. Encore faut-il assumer un certain désordre. En temps de trouble comme en temps de crise, tout appel à l’unité, à se serrer les coudes est un appel à la soumission passive. Ceux qui recherchent l’unité sont ceux du parti de l’Ordre. Tous ceux qui prétendent n’avoir que des positions stratégiques reproduisent le langage de l’État et du Prince. Ils repoussent le moment de la décision. Tous ceux qui normalement devraient se positionner contre le cirque mais ici le garantissent sont prisonniers de l’Infrastructure. On ne peut subvertir idéologiquement. Croire qu’on peut changer le langage, les gestes, les dispositions en gardant l’infrastructure est un mensonge. L’idéologie est un mensonge.

    Où sont les armes de la critique ? la critique sans armes est un vote, une simple et triste opinion. La puissance n’est pas simple affaire de nombre sauf si l’on postule que tout a une valeur, c’est-à-dire est quantifiable et échangeable. L’unité sur une idée est une chose, sur une pratique un geste. Aucune autre forme de police est possible. Ceux qui ont pour amie la police ont pour amie la marchandise. L’Information existe grâce au spectacle. Ceux qui pensent que « les gens » ne sont pas assez informés de ce qui se passe ou qui se soucient de « l’image du mouvement » disent ceci : « le monde ne fait pas assez bien son travail ». C’est l’avant-garde de demain. La véritable question est le désir : où sont nos désirs ? Le pacifisme pacifie. Une technique policière pour contenir les désirs d’insurrection, d’en finir effectivement.

    Se dire non-violent est accepter ceci : « on nous a désarmé, désamorcé jusqu’à la paralysie la plus totale ». Cela convient bien au monde. Se poser la question de « la violence » revient à penser comme un État. Il n’y a de violence uniforme que pour celui qui s’en arroge le monopole. La question de « la violence » est alors la question de la pacification : comment gérer « la violence » c’est-à-dire tout ce qui vient, de toutes parts et de tous camps, démobiliser et déborder le monopole étatique de la violence. Se pose ce paradigme : celui qui s’affirme non violent s’affirme pacifié, impuissant. Il accepte l’opération étatique : « la violence est tout ce qui vient déborder mes positions ». Il y a la violence fondatrice et la violence conservatrice. Brûler un commissariat n’est pas le même geste que le construire. Il y a ceux qui gardent un ordre et ceux qui veulent le détruire. Vient la violence fondatrice révolutionnaire : celle qui ne peut être récupérée et ne peut fonder aucun autre ordre. C’est la puissance. La question des armes, du point de non-retour dans le conflit. Ce point sans retour d’où le mirage de la violence comme problème se dissout en même temps que de chaque côté de la barricade on acte de cette situation : il s’agit d’une guerre qu’il faut gagner. Se dire non-violent c’est vouloir proposer une société sans-violence. Le nombre de techniques policières pour éradiquer et s’approprier tout cela devra être faramineux. Le nombre d’heures de yoga aussi.

    La meilleure des polices ne porte pas l’uniforme.

    La démocratie est une manièrte de gouverner. Tout type de gouvernement est mauvais. Le paradigme post-moderne : une administration et sa population, comme à la place : la commission et le Pueblo.

    Où avez-vous mis votre rage ? Êtes-vous si policés pour qu’au nom du pacifisme, la rage de toute une vie d’esclave soit évacuée ? Tant que l’on désire la marchandise, on est contre-révolutionnaire. Dans ton combat contre le monde seconde le monde. Voici le pouvoir du spectacle : « Des léopards s’introduisent dans le temple et s’abreuvent aux jarres d’offrandes qu’ils vident. Le phénomène ne cesse de se répéter : il finit par être intégré à la cérémonie. » Tout raser pour ne pas être récupéré. Vouloir garder un pan de ce monde est déjà vouloir le sauver. Le Capitalisme est l’économie de ses fuites. Refuser le point de vue gestionnaire n’est pas affaire de méthode mais bien de position politique. La gestion et sa métaphysique du pragmatisme froid et stratégique sont ennemis de tout processus d’abandon et de conflit. Il existe une différence, subtile au possible, entre être pacifiste par choix d’armes et désirer la paix avec les flics. C’est une différence de camp. Lorsque l’unique manière de se rendre lisible au monde et d’agréger les désirs est la revendication, la séduction, il y a comme une défaite programmée. Une puissance est ce qui arrache les hommes et femmes à la société ordinaire par des évènements. Le combat contre le mal finit toujours au lit lorsqu’on prête attention à sa force de séduction. Le monde n’est pas cool et twitter n’est pas le monde. Désormais la politique classique est s’informer. Être transparent signifie que l’on n’a rien à se reprocher, soit du fait que l’ON FAIT LE BIEN, soit que l’on est du néant passif, pour le reste, une caméra, un flic, un vigile, un appareil photo, un portique, un citoyen, tout cela est fatalement hostile. Pour être transparent il faut accepter d’être transpersé, c’est-à-dire perdre.

    Vendredi 10 juin 2011.
     
  7. jeunevoleur
    Offline

    jeunevoleur Membre du forum Membre actif

    2 445
    3
    108
    Mar 2008
    Critique du Mouvement des Indignés sur Montpellier
    Posted on 9 juin 2011 by juralib

    Pourquoi le mouvement des indignés ne mènera à rien ?



    J’ai tout d’abord voulu écrire une critique de ce mouvement qui puisse englober l’ensemble de ses points d’émergence puis je me suis rendu compte qu’il était présomptueux de ma part d’essayer de généraliser au niveau national ce que je n’ai vécu qu’au niveau local. Certes, d’après les échos (rares) que j’en ai, les tracts que j’ai pu lire ci et là, j’ai peu de doutes quant au caractère général de ce que je vais dénoncer concernant la ville de Montpellier, mais je ne veux pas stigmatiser l’ensemble du mouvement malgré tout.

    La toute première critique porte très simplement sur le nom du mouvement. « Indignés », comme si cela pouvait être autre chose qu’une posture morale appelant à l’inaction, ou plutôt n’appelant pas à l’action. Il a été proposé dès le début de changer le nom pour quelque chose de plus engageant comme « Révoltés » ou « Enragés » et il fut répondu « En Espagne, ils s’appellent Los Indignados ». L’argument contraire comme quoi on n’est pas obligés de refaire ce qui ne marche pas n’ayant pas trouvé d’écho favorable dans la majorité chantante, « Les indignés » fut conservé et remodelé quelques jours plus tard en « Les indignés, révoltés ». À trop chercher le compromis, on en devient toujours ridicule.

    La deuxième critique relève un nouvel exemple de la désertion du terrain politique. On NE veut PAS dire pourquoi on est « Indignés », ou du moins on ne veut pas le dire d’une manière qui puisse concerner l’ensemble des individus participant au mouvement. Comprenez que cela ne dérange a priori personne d’exprimer à titre personnel les divers points qui peuvent déranger, mais qu’il est exclu d’emblée de fixer au mouvement une ligne directrice, même vague, et ce par peur de diviser les gens. C’est une contradiction qui peut faire sourire, mais qui souligne à quel point la seule perspective d’une lutte paraît inenvisageable (comment combattre ce qu’on ignore ?). Contradiction car ces gens disent vouloir regrouper autour de certains thèmes « le peuple » (cette chimère) sans pour autant assumer ces thèmes. On retrouve derrière ce comportement une espèce de niaiserie vicieuse qui laisse entrer n’importe qui et n’importe quelle idée, pour peu qu’elle soit la conséquence d’une « indignation ». À quand la lutte révolutionnaire aux côtés des partisans PS/UMP/FN… ? Bien que tous soient d’accord pour désigner, toujours personnellement, le capitalisme comme étant à l’origine de la plupart des maux de la planète, il est hors de question d’inscrire le mot « anti-capitaliste » dans le manifeste du mouvement, toujours pour cette raison qu’on ne veut pas diviser ou faire peur aux gens. Au final on obtient donc une espèce de marasme idéologique (et j’insiste sur la signification première de ce mot) flasque qui ne sait ni d’où il vient, ni où il va, ni avec qui, donc qui est voué, nécessairement, à l’échec.

    Cet aspect timoré du comportement général (ne mettons pas tout le monde dans le même panier, le mouvement ayant adopté un caractère « démocratique », la majorité l’emporte plus ou moins mais il y a, bien heureusement, des voies dissidentes) m’amène à un troisième point, central et qui me fait avoir des paroles très dures vis-à-vis des individus qui s’expriment dans le cadre des assemblées populaires (devenues assemblées générales, point sur lequel je reviendrai par la suite). Ce troisième point est celui du rapport à la violence. On le sait, c’est toujours un écueil qui provoque de forts éclats de voix quand il arrive dans un débat, hors il se trouve qu’il a été amené quasiment tous les jours.
    Le mouvement « Les indignés » s’inscrit effectivement dans un mode d’action pacifiste revendiqué. Je n’aime pas le pacifisme, je le trouve creux, niais, malhonnête et irrespectueux par rapport aux milliers de gens qui subissent, quotidiennement ou non, la violence du système. J’estime que le pacifisme vide les corps et les esprits en leur coupant toute volonté offensive et toute portée illégale, il est l’apanage du syndicat qui veut se faire bien voir, mais il n’est pas le compagnon de route du combattant révolutionnaire, il est même son ennemi. Mais… Pourquoi pas, après tout ? Voilà qui est mon point de vue et je n’irai pas empêcher une action pacifiste sous le simple prétexte qu’elle l’est. Le problème se situe dans l’autre sens et soulève encore une fois une contradiction fondamentale.
    Premièrement on remarque que la définition donnée à « violence » n’est pas claire dès le départ, ce qui donne lieu à d’interminables débats stériles pour savoir si telle ou telle chose est violente ou ne l’est pas (pour vous donner un ordre d’idée de ce qui est acceptable pour « Les indignés », sachez qu’il a été jugé qu’un entartage était trop violent).
    Deuxièmement, et là on retourne dans des schémas de pensée absolument dégueulasses, leur obsession du pacifisme est telle qu’il a été proposé PLUSIEURS FOIS de créer une « Commission de vigilance à la non-violence », c’est-à-dire un groupe de gens qui surveillerait les autres et les empêcherait de commettre des actes jugés violents. En langage courant, on appelle ça une police. On retrouve les vieux comportements bureaucratiques autoritaires qui ont déjà fait leurs preuves, cette volonté d’imposer une marche à suivre, un code, et toujours parce qu’on veut « massifier », la perspective d’exclure les éléments indésirables, ceux qui gênent, qui donnent une mauvaise image. En gros, ils sont tellement opposés à la violence qu’ils sont eux-mêmes prêts à l’exercer pour l’empêcher. Bien sûr, ils vous diront que c’est faux, la violence morale, ça n’existe pas…

    Puisqu’on parle du rapport à la violence, il faut également parler du rapport à la police. Le campement situé sur l’Esplanade a été détruit plusieurs fois, les regroupements évacués et il y a eu quelques arrestations (simples contrôles d’identité). Pour protester contre ça, il a été proposé de se rassembler devant l’Hôtel de Police situé à quelques pas de là et de, par exemple, se faire passer pour mort sous les coups de la police. Aussitôt dit, aussitôt honni. La foule pacifique hue à en perdre haleine et crie à « L’alimentation de la haine ». Là, on a tout entendu, des propos les plus mièvres (« Les policiers sont aussi des êtres humains qui ont les mêmes problèmes que nous ! ») aux plus scandaleux, masochistes, gerbants, débiles (« La police elle nous tape dessus mais on l’aime bien quand même et il faut lui dire. »).

    On pourrait aussi parler de l’Inde, citée comme « la plus belle démocratie du monde ». On pourrait évoquer les paroles de certains qui disent « s’inspirer » de la place Tahrir et des révolutions arabes. Mais je crois qu’on est déjà tombés beaucoup trop profondément dans le grotesque et l’ignoble pour que ça soit intéressant de continuer.

    S’est produit également le glissement d’« Assemblée populaire » vers « Assemblée générale ». La différence est fondamentale. Avant le début de l’assemblée, les différentes commissions se réunissent (actions, logistique, communication…) et l’erreur, pointée dès le départ, est que l’assemblée débute par le compte-rendu des commissions. Les gens qui viennent à dix-neuf heures, prévenus qu’ils ont été, assistent donc pendant une à deux heures à ce qui n’est rien d’autre que l’administration du mouvement, l’organisation de la vie du campement et de temps en temps un peu branlette électorale sur une virgule de tel ou tel tract. Le côté « populaire » a complètement disparu au profit d’une « Commission d’organisation de l’AG » qui décide à groupe restreint (certes ouvert à tous mais la grosse majorité des gens n’ont pas forcément ni le temps ni l’envie d’y participer) de la façon dont va se dérouler l’AG. Quand un camarade a fait remarquer récemment, avant que l’AG débute, qu’il faudrait que les compte-rendus des commissions et tout ce qui concerne la vie du camp soient discutés avant ou après l’assemblée afin que les passants puissent s’arrêter et s’exprimer sur des sujets qui les concernaient (ce qui est le principe fondamental de l’assemblée populaire), il lui a été répondu : « Ce n’est pas ce qui a été décidé à la commission d’organisation ». Si on renifle, on sent comme l’odeur du cadavre de Staline.

    Un autre point, qui n’a lui non plus rien de nouveau, concerne le rapport aux médias que je qualifierai de schizophrène. Il y a toujours cette fascination du journal, cette joie immense d’y être, d’exister, enfin, socialement, d’être reconnu par la communauté médiatique et d’y trouver une certaine légitimité. On continue donc sur une démarche séductrice, on doit appeler les médias, on doit leur plaire, leur montrer nos plus beaux atours, et faire en sorte qu’ils parlent de nous beaucoup, et en bien. On se retrouve donc forcés de faire deux choses :
    1°) Faire ce qu’il faut pour avoir une bonne image. La place de la Comédie et l’Esplanade sont à Montpellier deux lieux de rencontres pour les sans-abris, les marginaux, les punks à chien… Donc ils venaient tous les jours, ou presque, au camp et aux assemblées générales. La majorité d’entre eux était vraiment cool, ils discutaient, aidaient pour la bouffe, pour la mise en place de diverses choses etc. mais quelques-uns d’entre eux devenaient parfois agressifs ou perturbaient les assemblées par des prises de parole intempestives, la plupart du temps ivres. Il y a eu à maintes reprises des rixes qu’il a fallu gérer mais jamais rien de grave. Bref, puisque ces gens « complètement bourrés » donnent une « mauvaise image du mouvement », un groupe de quatre ou cinq personnes s’est pointé la semaine dernière au début de l’assemblée générale pour dire « Il est désormais interdit de boire de l’alcool en assemblée générale ! Si certains veulent boire, qu’ils s’écartent de l’assemblée ! » Vous voyez donc le genre de méthodes employés par des gens qu’on ne peut plus qualifier autrement que par « sociaux-démocrates ».
    2°) Se contenter de faire uniquement ce qui rentre dans un cadre strictement légal (et ce à un tel point qu’on s’inquiète même d’apposer « Ne pas jeter sur la voie publique » au bas des tracts) afin que les médias ne puissent pas dire que nous sommes de vilaines personnes qui veulent tout détruire et donc se condamner à rester attentivement à l’intérieur des lignes tracées qu’on dit pourtant vouloir redéfinir. « Tracter » devient pour le coup une seconde nature, un nouvel objectif de vie. On tracte, on tracte, et quand on n’a plus de tracts, on va en imprimer et on recommence. Sur la Comédie, il y a un McDonald’s, plusieurs actions le concernant ont été évoquées mais… « Il ne faudrait pas être en mauvais terme avec nos voisins ».
    Et je parlais de comportement schizophrène parce qu’à côté de cette envie dévorante de figurer au sein des plus grands médias, on retrouve néanmoins une certaine méfiance vis-à-vis de ces derniers : « Tous des menteurs », « Ils ne disent que ce qui arrange la mairie »… En fait, on en déduit qu’au-delà même de toute volonté subversive (dont on finit par se demander si elle existe vraiment), ce qui détruit ce mouvement est, en partie, la même chose que ce qui a détruit les autres, à savoir le besoin viscéral d’être nombreux, et en attendant : l’inaction.

    La volonté clairement affichée de se passer des partis politiques et des syndicats, de ne se revendiquer d’aucune couleur politique est dans le fond une bonne chose. La méfiance vis-à-vis de la récupération du mouvement par les politiciens existe et les gens n’ont pas envie qu’on leur prenne ce qu’ils ont construit. Néanmoins, cela est poussé à un tel point qu’on en vient à renier toute affiliation politique, à refuser tout débat qui ne font que diviser les gens et créer des hostilités. Au final, et c’est ce que je disais au début, le « peuple » se retrouve sans trop savoir pourquoi, ni comment et la mesure de la force du mouvement ne se fait plus à la puissance de sa pensée et à sa détermination mais simplement au nombre d’individus qui le composent. En gros, on peut interpréter ça comme étant un processus qui divise malicieusement ces gens qui proclament l’union car ce qu’ils cherchent n’est pas une force basée sur des intérêts communs, des liens entre les personnes et des envies concordantes qui permettent de constituer une conscience de groupe (pour ne pas dire de classe), mais simplement une force basée sur une somme d’individus qui pourraient, a priori, n’avoir rien ou presque en commun, c’est-à-dire des forces isolées et contraires.

    Quand on s’interroge sur cette fascination morbide pour le pacifisme, on retrouve Nietzsche qui disait déjà il y a cent ans, que le Christianisme avait réduit l’être humain occidental à l’état de larve incapable de se défendre, de se battre et de faire valoir son droit à la vie en lui imposant systématiquement un comportement de victime du divin. « Ne juge pas ton prochain », « Si on te frappe une joue, tends l’autre joue »… sont autant de proverbes et d’enseignements deux fois millénaires qui désactivent toute envie de révolte (toute volonté de puissance). Bien sûr, ces enseignements ne sont plus endoctrinés aujourd’hui de la même manière qu’ils pouvaient l’être à l’époque de Nietzsche ou encore avant, mais ce sont néanmoins des fondements que l’on retrouve dans l’obligation citoyenne de soumission à l’autorité par exemple, ou dans les propagandes que l’on a pu voir sur des mecs comme Gandhi (dont l’icône est sans cesse adulée par les pacifistes qui du même coup crachent sur tous ceux qui sont morts lors d’attentats pour la cause que défendait Gandhi et qui ont, eux aussi, grandement participé à la victoire contre l’Angleterre) ou Martin Luther King. On est à une époque du refus de la confrontation, où la peur du rapport de force prédomine et coupe court à toute velléité révolutionnaire, c’est l’ère du « Tous d’accord ». D’ailleurs on remarque lors des assemblées quotidiennes la conviction partagée que si les gens ne nous rejoignent pas, ce n’est pas parce qu’ils s’en foutent, ce n’est pas parce qu’ils n’ont pas de conscience politique, ce n’est pas parce qu’ils ont d’autres opinions, non, c’est juste qu’on s’y prend mal et qu’on ne leur donne pas envie de venir nous rejoindre. On n’imagine même pas qu’on puisse avoir à combattre, littéralement, un adversaire déclaré, qu’on puisse avoir des ennemis qui s’opposeront à nous et contre lesquels il faudra vaincre ou périr. C’est de l’idéologie pure et simple, une version biaisée du réel qui ne tient compte que des informations localement vécues (pour un mouvement qui se prétend international, ça la fout mal) et qui est capable d’opposer bisous et chansons à matraques et pistolets, qui ose passer des heures à déblatérer pour rien avec des flics qui disent « On n’a pas le choix » plutôt que de prendre les devants et décrocher ce qui doit nous revenir.

    Bien évidemment, ce n’est pas le manque de radicalité qui m’a fait fuir, comme beaucoup de copains, ce mouvement. Je ne m’attendais pas à ce que dès les premiers jours se construise une critique radicale et nouvelle du capitalisme, prête à prendre les armes. Ce qui me dérange énormément, c’est l’hypocrisie qui consiste à reproduire consciemment des schémas qu’on dénonce, et l’autoritarisme qui en découle. Le mouvement de foule, stupide, qui coupe la parole ou hue quand on parle d’occuper un Pôle emploi pour lutter contre la précarité, mais fait silence ou applaudit quand on parle pendant une heure de la possibilité éventuellement envisageable de soumettre au vote la réécriture du manifeste.
    Il y a toutefois du positif. Certaines personnes découvrent totalement la politique et apprennent qu’il est possible de construire sans gouvernement. Néanmoins, cela est fait dans un tel cadre que ça ne peut rien amener d’autre que ce qui existe déjà : du militantisme politique à la sauce CGT/Unef/PS…
    Voilà pourquoi le mouvement des indignés sur Montpellier ne peut, à mon sens, au mieux servir qu’à grossir les rangs du NPA.

    Jeudi 9 juin 2011.
     
  8. jeunevoleur
    Offline

    jeunevoleur Membre du forum Membre actif

    2 445
    3
    108
    Mar 2008
    Pacifisme à la Facebook sur les places européennes
    Posted on 2 juin 2011 by juralib

    Combien d’amis le pacifisme compulsif a sur Facebook ?

    Le 25 mai depuis l’après-midi près de 40’000 genre de néo-Grecs ont rempli la place Syntagma validant ainsi de la pire des manières le mémorandum de la Troïka, les mesures d’austérité et le privilège de l’exclusivité quand à l’usage de la violence de la part de l’État.
    http://pix.toile-libre.org/upload/original/1306988401.jpg

    Place Syntagma à Athènes, le 26 mai 2011

    Hier, des nécrophiles petits-bourgeois, ont pris place là ou il y a tout juste deux semaines l’État attaquait férocement la manifestation de la grève du 11 mai établissant le record de centaines de têtes ensanglantées, et envoyant le manifestant Yannis Kafkas à l’hôpital dans le coma ; quelques jours plus tard, un peu plus loin de Syntagma eut lieu une sans précédente ascension de violence raciste et de cannibalisme social — dans d’autres quartiers déclassés du centre d’Athènes se répétèrent les attaques de flics et de fascistes contre des maisons, magasins d’immigrés ainsi que contre des squats anarchistes, les dévots des fascistes usèrent comme prétexte l’assassinat de Manolis Kantaris, dans le même temps des groupes de néo-nazis lançaient des pogroms blessant au total des centaines d’immigrés, et poignardèrent sauvagement le Bangladesh Alim Abdul Manan.

    Le rassemblement pacifique avait lieu alors que quasiment dans le même temps des compagnons se rassemblaient sur la place Victoria pour résister activement contre la terreur d’État, les ségrégations raciales et la merde d’ossature étatique. En accord avec les normes du pathétique et réformiste mouvement espagnol « Democracia Real YA » et « Geração à rasca » des pacifistes portugais, un nouveau rassemblement apolitique a été appelé par Facebook, en face du Greek Kynovoulio cette fois [Kynovoulio, Doghouse au lieu de Koinovoulio, le Parlement — un jeu de mots intraduisible]. La présence symbolique de flics en face du monument du soldat inconnu ne doit pas nous tromper. Ce n’était pas seulement la police anti-émeute qui défendait les symboles du pouvoir mais surtout le grand nombre des « citoyens indignés » qui ont pleinement déclaré allégeance aux patrons et à l’État.

    Le pacifisme compulsif d’un pseudo mouvement de résistance était, est et sera une version supplémentaire de la violence d’État. Où qu’ils soient les partisans du régime parlementaire proposent d’étendre le pacifisme pour manipuler les foules et canaliser la rage des peuples sur les voies du réformisme dans le système existant sans le renverser. Après tout c’est justement des manifestants pacifistes et démocratiques que demandent l’État et le capital.

    Ces premiers rassemblements que se soit sur la place Syntagma à Athènes ou sur les autres points centraux des autres villes de Grèce sont des informels votes de confiance à un système pourri dans son fondement. Nous voyons au niveau européen que de tels mouvements fonctionnent comme des soupapes contre la guerre sociale et de classe. Ce que la matraque d’un flic et le couteau d’un facho ne peuvent pas atteindre, l’est par la propagande de « facebookeurs » apolitiques et réformistes.

    Le mouvement antagoniste et les dissidents radicaux doivent [mesurer] la nature réactionnaire et contre-révolutionnaire de ces contrefaçons des révoltes du monde arabe. Une des caractéristiques fondamentales du capitalisme est son pouvoir à transformer et absorber les voix de ceux qui le défient. En désignant par des mots tels que rage, révolte, révolution, le système et ses supporters espérant ainsi rabaisser le mouvement de libération social et le détourner sur des voies incolores pour eux-mêmes.

    Les avertissements donnés par les madrilènes aux campeurs de Syntagma tel que « pas d’attaques émeutières » ont été entendus par énormément de gens. La presse du régime reproduit, invente et orne les arguments pacifistes, les vendant comme le seul espoir de perspective.

    Tant que nous n’agissons pas pour prendre les moyens de production, abolir la propriété, qu’une rébellion multiraciale qui mette en place des structures mutuelles et auto-gérés, qu’au lieu de ça nous abandonnons nos drapeaux et nos armes à Syntagma [également Constitution] ou n’importe où en chantant l’hymne national ; tant que nous restons dans une ambiance joyeuse avec des guitares et des chansons sirupeuses plutôt que de prendre une pierre, nous restons les esclaves des patrons.
     
  9. jeunevoleur
    Offline

    jeunevoleur Membre du forum Membre actif

    2 445
    3
    108
    Mar 2008
    3 articles paru sur le juralib.
     
  10. Alter-Natif
    Offline

    Alter-Natif Nouveau membre

    2
    0
    0
    Juin 2011
    Pleins d'arguments très intéressants, certains avec lesquelles je suis d'accord, d'autres envers lesquelles, je pourrais en effet devenir un ennemi. Ce qui nous rassemble, c'est sans doute notre utopisme. En revanche beaucoup de valeurs nous éloignent, et peut être que mes valeurs participent de la collaboration sociale démocrate du système en place. Cependant j'ai l'espérance de croire que ma capacité à remettre mes valeurs en question, à mobiliser mon esprit m'éloigne du libéralisme que je réprouve, me donne à voir les tournures de la société marchande, ou encore qu'elles me préservent de l'individualisme divisionniste.

    Les dernières nouvelles concernant ce mouvement espagnol te donnent en parti raison. En parti seulement, car rare sont les révolutions, ou même les rebellions et autres insurrections qui atteignent leurs buts sans persévérance.

    Enfin je te remercie pour ce partage d'idées. Salutations
     
  11. Tazon
    Offline

    Tazon Membre du forum Membre actif

    1 486
    2
    23
    Nov 2008
    France
    Et aucune révolution ne s'est déroulée pacifiquement.
     
Chargement...
Discussions similaires
  1. Réponses:
    0
  2. Réponses:
    14
  3. Réponses:
    73
  4. Réponses:
    0
  5. Réponses:
    2
  6. Réponses:
    14
  7. Réponses:
    0
  8. Réponses:
    35