Chargement...
  1. Pour consulter le Webzine : https://www.libertaire.net/articles

Luttes vertes Japon : Eau et nourriture contaminé

Discussion dans 'Webzine - actualité des luttes et partage d'articles de presse' créé par Ungovernable, 22 Mars 2011.

  1. Un niveau d’iode radioactif plus de trois fois supérieur à la limite légale a été relevé lundi dans l’eau d’un village situé à 40 km de la centrale nucléaire de Fukushima, a indiqué lundi le gouvernement, ajoutant qu’il n’y avait pas de risque immédiat pour la santé.

    Le ministère de la Santé a précisé que la quantité d’iode radioactif dans un échantillon prélevé dimanche à Iitatemura, à environ 40 km de la centrale, s’élevait à 965 becquerels par kg, contre 300 becquerels par kg fixés comme limite à partir de laquelle il est déconseillé de boire l’eau ;





    Contamination nucléaire : l’OMS s’inquiète.

    Les ingénieurs japonais engagés dans une course contre la montre pour empêcher une catastrophe nucléaire à la centrale de Fukushima font de lents progrès mais les premiers signes d’irradiation inquiètent.

    La contamination d’aliments issus de la région de Fukushima signifie que la crise est plus grave que prévu, a estimé lundi l’Organisation mondiale de la Santé (OMS).

    Tokyo Electric Power (Tepco), opérateur de la centrale de Fukushima-Daiichi endommagée par le séisme du 11 mars, est parvenu à connecter tous les réacteurs au réseau électrique et à relancer la pompe de refroidissement du réacteur n°5.

    Pour les réacteurs 3 et 4, les plus gravement endommagés, les autorités continuent à limiter les dégâts en arrosant de milliers de tonnes d’eau de mer les réacteurs et leurs piscines de combustible usagé, en attendant de tester les systèmes de refroidissement.

    De la fumée, dont on ignore l’origine, s’est échappée lundi des réacteurs 2 et 3, ce qui a entraîné l’évacuation d’une partie du personnel.

    La pression continue d’augmenter dans le réacteur n°3, qui contient du plutonium et où les ingénieurs envisagent toujours de libérer de la vapeur et donc des particules radioactives.

    Le Premier ministre japonais a malgré tout affiché son optimisme. "Nous voyons la lumière qui nous guide vers la sortie de crise", a dit Naoto Kan dans des propos rapportés par un responsable gouvernemental.

    Le directeur général de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), Yukiya Amano, s’est dit certain que cette crise serait surmontée, sans dissimuler qu’elle était "très grave".

    "OUF DE SOULAGEMENT"

    Il n’est pas certain que les pompes de refroidissement puissent fonctionner mais dans tous les cas le raccordement au réseau électrique va faciliter l’arrivée d’eau, disent les experts, qui voient là un progrès significatif.

    "Une fois que les réacteurs pourront être à nouveau inondés, on pourra pousser un ouf de soulagement car la phase un sera terminée", dit Laurence Williams, professeur de sûreté nucléaire à l’institut John Tyndall, en Grande-Bretagne.

    Les vents ont jusqu’ici soufflé vers Tokyo, située à 240 km au sud de la centrale endommagée par le séisme et le tsunami qui ont fait plus de 21.000 morts et disparus.

    La pluie s’est mise à tomber lundi sur le site, ce qui peut conduire à concentrer localement les dépôts de radioactivité au sol selon l’Autorité française de sûreté nucléaire.

    À mesure que s’éloigne la menace d’une fusion des coeurs des réacteurs, la crainte de la contamination radioactive augmente.

    Des épinards et du lait contaminés ont été détectés samedi et le ministère de la Santé a enjoint des habitants des zones proches de la centrale de ne pas boire l’eau du robinet en raison d’un niveau élevé d’iode radioactive.

    "C’est bien plus grave que ce qu’on pensait les premiers jours lorsqu’on croyait que ce genre de problème pouvait être cantonné dans un rayon de 20 à 30 kilomètres", a expliqué Peter Cordingley, porte-parole de l’OMS pour la région Pacifique ouest.

    Le Japon exporte beaucoup de fruits et légumes, de produits laitiers et de poissons et fruits de mer. La Chine et la Corée du Sud vont augmenter leur surveillance des produits japonais.

    Peter Cordingley estime qu’"on peut raisonnablement supposer que des produits contaminés sont sortis de la zone de contamination."

    EAU RADIOACTIVE

    Des experts s’inquiètent aussi des conséquences pour l’environnement des mesures prises à la centrale.

    "Où s’écoule l’eau de mer" utilisée pour refroidir les réacteurs, demande Najmedin Meshkati, chercheur à l’université de Californie du Sud. "Ces sont maintenant des eaux usées radioactives (...) J’aimerais savoir ce que l’on fait de cette eau, est-ce qu’on la récupère ou est-ce qu’on la laisse simplement couler jusqu’à la mer. C’est la partie immergée de la catastrophe", poursuit Meshkati.

    Les autorités japonaises ont reconnu qu’un peu de cette eau pourrait se retrouver dans l’océan mais doutent que cela ait un quelconque effet sur la santé humaine.

    Parallèlement à cette crise se poursuivent les efforts pour retrouver des survivants du séisme de magnitude 9.0 et du mur d’eau de dix mètres de haut qui ont balayé le nord-est du pays.

    Le dernier bilan fait état de 8.805 morts et 12.564 disparus mais la police dit redouter plus de 15.000 morts dans la seule préfecture de Miyagi, la plus touchée par la catastrophe.

    Il restait lundi soir quelque 320.000 sans-abri, essentiellement dans le nord du pays où la neige et des températures glaciales entravent le travail des secours.

    Le séisme et le tsunami pèseront ces prochains mois sur la croissance économique nippone mais la reconstruction, qui pourrait durer cinq ans, redonnera ensuite un coup de fouet à l’économie, a estimé la Banque mondiale dans un rapport publié lundi.

    L’agence RMS estime que la catastrophe naturelle a coûté entre 200 et 300 milliards de dollars en pertes économiques. Le séisme de Kobé, qui a fait plus de 6.400 morts en 1995, avait coûté quelque 100 milliards de dollars.













    L’OMS juge grave la radioactivité dans des aliments au Japon.

    La découverte de traces radioactives dans des produits alimentaires au Japon après l’accident de la centrale nucléaire de Fukushima constitue un problème bien plus grave que prévu, a jugé lundi l’Organisation mondiale de la Santé (OMS).

    "Il est assez évident qu’il s’agit d’une situation grave", a déclaré Peter Cordingley, porte-parole de l’OMS pour la région Pacifique Ouest, interrogé au téléphone par Reuters.

    "C’est bien plus grave que ce que n’importe qui pouvait penser les premiers jours lorsque nous pensions que ce genre de problème pouvait être cantonné dans un rayon de 20 à 30 kilomètres", a-t-il ajouté.

    Des traces de radioactivité ont été décelées dans des légumes, du lait et de l’eau courante après l’accident à la centrale de Fukushima, endommagée par un séisme et un tsunami survenus le 11 mars.

    Cette contamination a alimenté l’inquiétude des populations en Asie malgré les assurances des autorités nippones sur l’absence de menace sanitaire induite par ces niveaux de radioactivité.

    Le gouvernement japonais a interdit la vente de lait cru produit dans la préfecture de Fukushima et d’épinards cultivés dans les environs.

    Rien ne prouve pour l’instant que de la nourriture contaminée en provenance de la préfecture de Fukushima a été exportée vers d’autres pays que le Japon, souligne cependant l’OMS.

    "Nous ne pouvons établir aucun lien entre (la centrale de Fukushima) Daiichi et les exportations. Mais on peut raisonnablement supposer que des produits contaminés sont sortis de la zone de contamination", a dit Peter Cordingley.
















    Japon : des traces d'iode radioactive trouvées dans l'eau et l'alimentation
    Des taux de radioactivité anormaux ont été signalés samedi 19 mars sur du lait et des épinards produits à proximité de la centrale nucléaire de Fukushima, alors que plusieurs pays étrangers contrôlent déjà les produits alimentaires venant du Japon.
    Des traces d'iode radioactive et de césium ont également été trouvées dans l'eau du robinet de Tokyo et ses environs dans des proportions inférieures aux limites légales.

    Ces niveaux de contamination ne sont pas dangereux pour la santé, a assuré le porte-parole du gouvernement Yukio Edano, en appelant la population à garder son calme.
    "Même si une personne se mettait à boire du lait contaminé pendant un an, la dose de radiations qu'elle recevrait serait équivalente à celle d'un seul scanner" à l'hôpital, a-t-il dit. Pour les épinards, ce niveau "serait équivalent à un cinquième de la dose reçue lors d'un scanner", a-t-il ajouté.

    Pour tenter de rassurer la population, l'AEIA a annoncé qu'elle allait effectuer des mesures de radioactivité à Tokyo, distinctes de celles du gouvernement.
    Déterminer la provenance



    Cette annonce intervient deux jours après l'ordre donné par le gouvernement aux autorités locales d'effectuer des tests de radioactivité à cause de l'enchaînement d'accidents à la centrale de Fukushima, située à 250 km au nord-est de Tokyo.
    Pour la première fois au Japon, les autorités ont fixé des seuils légaux pour différents types d'aliments, en fonction de normes internationales et du régime alimentaire nippon.
    Le ministère de la Santé a ordonné aux autorités locales d'enquêter pour déterminer la provenance précise du lait et des pousses d'épinards contaminés, connaître l'endroit où ils ont été distribués, et en fonction du résultat, stopper les ventes et prendre les mesures appropriées, a dit Yukio Edano.
    Dans la crainte d'un embargo



    Sans attendre, le gouverneur de la préfecture d'Ibaraki a demandé aux producteurs d'épinards d'arrêter de les récolter et de stopper les livraisons.
    "Les épinards absorbent particulièrement bien les radiations, c'est pourquoi j'espère que les enquêtes montreront que les autres produits agricoles ne posent pas de problème", a déclaré Yukihiro Ebisawa, un responsable des coopératives agricoles de ce département.
    Yukihiro Ebisawa se souvient avec amertume de l'accident dans une usine de retraitement d'uranium à Tokaimura en 1999. "Nos produits ont été rejetés au-delà de la zone frappée par un embargo, et parfois, même le riz récolté l'année précédente n'a pas trouvé preneur".
    Mauvaise communication du gouvernement



    Dans le village d'Izumi, à 60 kilomètres de la centrale nucléaire, la laiterie Minami Dairy a "complètement arrêté les livraisons".
    Mais son président, Hideki Mukaitsubo, critique le gouvernement quant à l'annonce de la contamination. "Je pense que cette information a été publiée trop rapidement, sans détails sur la méthode utilisée ni aucune assurance nous concernant".
    Minami Dairy, qui récolte le lait de plusieurs élevages de la région, a une production de 7.300 tonnes de lait par an pour un chiffre d'affaires d'un milliard de yens (8,75 millions d'euros) par an.
    Contrôles partout dans le monde



    Sur Twitter, le blogueur sakuya_ntg appelle le Premier ministre Naoto Kan à "aller sur le terrain pour manger ces épinards et boire ce lait" pour lutter contre ces "rumeurs néfastes".
    L'opérateur de la centrale nucléaire accidentée, Tepco, a présenté ses excuses et annoncé qu'il était prêt à dédommager les paysans.
    Sans attendre l'annonce des prélèvements effectués sur le terrain, plusieurs pays étrangers avaient déjà pris des mesures préventives contre les produits alimentaires nippons.
    Dès lundi, Singapour a annoncé des tests "en raison du risque potentiel de contamination".
    En Inde, des examens ont également été mis en place, tandis que les autorités européennes avaient recommandé dès mardi aux Etats membres de l'UE de contrôler la radioactivité des aliments importés du Japon.








    Des radiations détectées sur des fèves importées du Japon

    A Taïwan, les autorités sanitaires ont détecté des radiations sur des fèves importées du Japon, mais les taux sont bien inférieurs aux niveaux autorisés.
    Des radiations ont été détectées pour la première fois dimanche 20 mars à Taïwan sur des fèves importées du Japon, a indiqué une responsable des autorités sanitaires taïwanaises.

    Les radiations ont été trouvées sur 14 kilos de fèves en provenance de Kagoshima, dans le sud de l'archipel, a précisé la responsable, Tsai Shu-chen.

    Les fèves contenaient 11 becquerels (bq) par kilo d'iode radioactif et 1 bq par kilo de césium 137, a-t-elle précisé à l'AFP, appelant à la population à ne pas paniquer.


    Les fèves seront détruites


    Les fèves, qui vont être détruites, pourraient avoir été contaminées lors de leur transit à l'aéroport Narita de Tokyo, avant d'être envoyées à Taïwan, a précisé Tsai Shu-chen à l'AFP.

    C'est la première fois qu'une contamination de nourriture est annoncée en dehors du Japon.

    Alors que le Japon lutte toujours pour empêcher un accident nucléaire majeur à la centrale de Fukushima endommagée par le séisme et le tsunami du 11 mars, les autorités japonaises avaient annoncé samedi avoir trouvé des taux de radioactivité anormaux dans du lait et des épinards.

    Les autorités avaient assuré que ces niveaux n'étaient pas dangereux pour la santé.

    Des traces d'iode radioactive et de césium ont également été trouvées dans l'eau du robinet de Tokyo et ses environs dans des proportions inférieures aux limites légales.










    Nucléaire : la catastrophe sanitaire


    Le peuple japonais vit l'un des pires accidents industriels de l'histoire du capitalisme. A l'occasion du 20e anniversaire de Tchernobyl, Sveltana Alexievitch, auteur biélorusse d'un livre de témoignages des victimes de Tchernobyl, avait eu cette pensée prémonitoire : "Tchernobyl : notre passé ou notre avenir ?" (Le Monde, 25 avril 2006). Hélas, en ce 25e anniversaire de Tchernobyl, le cauchemar de Fukushima renoue, au Japon, avec cette expérience terrible de l'accident nucléaire.

    Tant l'exploitant japonais Tepco et les autorités japonaises que leurs homologues français n'ont admis la gravité de ce qui se passait à Fukushima qu'à reculons, au compte-gouttes, cherchant à protéger le plus longtemps possible l'industrie nucléaire elle-même des conséquences économiques et symboliques de ce désastre, plutôt que ses victimes. Les uns et les autres ont sans cesse parlé d'une catastrophe à venir, alors qu'elle est là depuis le premier panache de fumée radioactive. Les dirigeants d'Areva l'ont compris dès le vendredi 11 mars, jour du tremblement de terre, eux qui ont immédiatement fait évacuer leurs salariés allemands intervenant dans la maintenance du site de la centrale de Fukushima.

    Cet accident dramatique s'inscrit en continuité d'une autre catastrophe, insidieuse et niée, celle des conséquences sanitaires - tenues délibérément invisibles - de la contamination et de l'irradiation de faible intensité, liées au développement de la filière nucléaire, au Japon comme ailleurs. Mais revenons tout d'abord sur ce qui se passe à Fukushima.

    Fukushima : la contamination radioactive et ses victimes

    Engagés dans une lutte acharnée contre le pire - l'explosion nucléaire, aux abords de Tokyo, ville de 35 millions d'habitants -, des travailleurs subissent depuis une semaine de très fortes expositions à la radioactivité au sein des installations détériorées. Mardi 15 mars, après l'explosion du bâtiment qui abrite le réacteur n° 2, explosion ayant entraîné une perte de confinement, les autorités japonaises ont publié des niveaux d'exposition externe excessivement élevés, de 30 à 400 milliSieverts (mSv) par heure, autour des différents réacteurs.

    Selon le communiqué de la Criirad du 16 mars, avec des valeurs aussi élevées (1 million de fois et plus le bruit de fond naturel), des effets directs (dits "déterministes") sur l'organisme humain se produisent rapidement (en quelques heures, quelques jours, quelques semaines). Il s'agit d'une destruction massive des cellules, en particulier celles de la moelle osseuse, de la muqueuse intestinale, ainsi que les cellules basales de la peau.

    Cette destruction cellulaire peut altérer le fonctionnement de certains organes, voire engager le pronostic vital. Plus le nombre de cellules détruites est important, plus les effets sont graves. Les travailleurs exposés à ces très fortes doses de rayonnements ont-ils été "désignés volontaires" ? Qui sont-ils ? Aucun témoignage direct n'a été recueilli auprès d'eux. Comme les "liquidateurs" de Tchernobyl, ils sont sacrifiés pour tenter d'empêcher l'apocalypse.

    Depuis samedi matin 12 mars, et la première explosion sur le réacteur n° 1, l'échappement de vapeurs radioactives dans l'atmosphère est continu. Les populations vivant sous le vent de ces vapeurs radiotoxiques subissent une exposition à la radioactivité, sous forme de particules présentes dans l'air contaminé. A faible et très faible dose, les effets de l'exposition à la radioactivité sont différés dans le temps. Il s'agit, entre autres, des cancers et des atteintes à la reproduction.

    La radioactivité entraîne des mutations cellulaires, à l'origine de la prolifération de cellules cancéreuses. Les cancers d'enfants peuvent être associés non seulement à une exposition aux rayonnements ionisants de l'enfant lui-même, mais aussi à une exposition in utero lors de la grossesse de sa mère ou à une mutation cellulaire de l'ADN du père du fait de sa propre exposition aux rayonnements ionisants. Des altérations génétiques provoquées par la radioactivité portent atteinte à la fonction reproductive, conduisant à la stérilité ou à des malformations graves chez les nouveau-nés.

    Enfin, des effets de la contamination radioactive chronique à faible dose, mal étudiés, ont aussi été décelés, notamment chez les enfants biélorusses, à la suite de l'accident de Tchernobyl, provoquant notamment des pathologies cardiaques précoces. Les conséquences des expositions à faible dose se manifesteront, de façon aléatoire, dans dix ans, vingt ans, trente ans, voire plus.

    L'absence de recensement rigoureux de ces atteintes, au fur et à mesure de leur apparition, comme dans le cas des essais nucléaires ou des catastrophes précédentes (en particulier Tchernobyl) empêchera de faire le terrible bilan de cette catastrophe. Quel est donc le retour d'expérience dont parlent les autorités gouvernementales françaises ?

    En France, irradiation et contamination à bas bruit

    La France n'a pas connu d'accident majeur, mais une contamination radioactive insidieuse s'est installée en continu à partir de différentes sources, à commencer par les déchets miniers de sites désormais fermés. Chaque année, l'Autorité de sûreté nucléaire recense sur le parc nucléaire plusieurs centaines d'"incidents", dont certains s'accompagnent de rejets radioactifs dans l'environnement.

    Des autorisations de rejets radioactifs sont régulièrement octroyées aux différents sites nucléaires, entraînant une pollution radioactive de l'air et des rivières. La gestion des déchets nucléaires et le démantèlement des réacteurs en fin de vie supposent une pollution radioactive chronique, tandis qu'un arrêté ministériel du 5 mai 2009 prévoit la dérogation possible du code de la santé publique pour l'ajout de substances radioactives dans les biens de consommation (www.criirad.org). Il s'agit d'une augmentation lente et pernicieuse du niveau de radioactivité dite "naturelle".

    Une longue enquête auprès des travailleurs intervenant en sous-traitance de la maintenance des installations nucléaires en France m'a permis d'approcher l'envers de l'industrie nucléaire. Les 58 réacteurs nucléaires français supposent la réalisation annuelle d'arrêt de certains réacteurs pour maintenance. Entre 25 000 et 35 000 travailleurs de la maintenance (robinetiers, décontamineurs, décalorifugeurs, mécaniciens, électriciens, agents de contrôle) interviennent en zones dites "contrôlées" (c'est-à-dire radioactives) pour effectuer les vérifications, réparations, modifications nécessaires au bon fonctionnement des réacteurs et des circuits de refroidissement.

    Plus une centrale vieillit, plus la contamination radioactive est intense et plus l'intervention est "coûteuse en dose". C'est ainsi que les exploitants français du nucléaire ont été amenés à sous-traiter ces tâches dangereuses et à mettre en place un système de gestion de l'emploi par la dose.

    Sur une intervention à fort débit de dose, plusieurs ouvriers vont se succéder très rapidement afin de rester dans la limite de dose autorisée. Le récit de ces activités permet de lever le voile sur cet envers incontournable, mais invisible, de l'industrie nucléaire. C'est ce que montre l'histoire de Pierre, atteint à 52 ans d'un cancer professionnel reconnu radio induit par l'assurance-maladie.

    Directement affecté aux travaux sous rayonnement (DATR)

    Pierre est DATR. Cela signifie qu'il a reçu une formation de quelques jours en radioprotection et que le médecin du travail a signé pour lui un certificat médical de "non-inaptitude à l'exposition aux rayonnements ionisants". Salarié d'une entreprise sous-traitante, il intervient en zone irradiée des centrales, par exemple pour la pose de protections aux "points chauds" (débit de dose : 50 à 60 mSv/heure).

    Pour permettre la réalisation d'opérations de maintenance par d'autres travailleurs (robinetier, tuyauteur), il faut ramener le débit de dose en dessous de 2 mSv/heure. Pour cela, Pierre doit entourer la tuyauterie radioactive d'un matelas de plomb en le maintenant avec une sangle. C'est une opération pour laquelle les intervenants se relaient à plusieurs toutes les quinze minutes.

    Une autre activité habituelle de Pierre est la décontamination des parois de la piscine dans laquelle le combustible a été entreposé lors des arrêts de tranche. Le travail se fait au chiffon, à genoux. L'ouvrier est protégé de la contamination radioactive par une tenue vinyle - dite "Mururoa" - et un appareil de respiration assisté. Mais cet équipement ne le protège pas de l'irradiation externe.

    Se déplaçant de centrale en centrale, Pierre a accompli ce travail pendant vingt-huit ans avant de tomber malade. La reconstitution de son exposition aux rayonnements ionisants montre une dose cumulée tout au long de sa carrière de 316 mSv. La dose carrière moyenne sur trente ans d'un agent EDF est de 19 mSv, soit 15 fois moins. Or, une enquête épidémiologique internationale chez les travailleurs statutaires du nucléaire de 15 pays montre une surmortalité par cancer dans cette population exposée, en moyenne sur la durée de la vie professionnelle, à 19 mSv.

    Les travailleurs sous-traitants reçoivent plus de 80 % de la dose collective annuelle subie sur les sites. Parmi ces travailleurs, certains sont aujourd'hui atteints de cancer, mais rien n'est fait pour relier précisément leur cancer à leur parcours professionnel dans l'industrie nucléaire.

    Ils auraient dû ou devraient bénéficier d'un suivi médical gratuit permettant d'enregistrer au fil du temps, dans cette population fortement exposée, la survenue des cancers et d'étudier l'incidence du cancer en référence aux caractéristiques de leur exposition. L'enregistrement systématique de leur dosimétrie l'aurait permis. Le choix des autorités a été de ne pas s'engager dans cette voie. Ces travailleurs demeurent invisibles et leurs cancers se "diluent" dans l'ensemble des cas de cancer.

    Un fléau comparable à l'amiante

    Tricastin, Paluel ou Fessenheim, Tchernobyl et Fukushima, tous ces sites nucléaires participent d'une même catastrophe sanitaire d'une ampleur comparable à celle de l'amiante, qu'il s'agisse de la contamination radioactive à bas bruit dans la routine des parcs nucléaires, ou d'une pollution de grande ampleur provoquée par les accidents tels que ceux de Tchernobyl et de Fukushima.

    Partout dans le monde, à longueur d'année, pour assurer la maintenance des installations nucléaires, des travailleurs, le plus souvent précaires, subissent des conditions de travail et de vie incompatibles avec la dignité humaine. Les maintenir dans l'invisibilité est le moyen choisi par le lobby nucléaire pour sauvegarder l'image, aujourd'hui brisée, d'une industrie sans risques.

    La catastrophe de Fukushima révèle au monde cet autre scandale de santé publique. Puisse cet article contribuer à la reconnaissance de l'engagement des travailleurs de Fukushima qui, aujourd'hui, sacrifient leur vie pour tenter d'éviter l'apocalypse.
     
    Dernière édition: 22 Mars 2011
Chargement...
Discussions similaires
  1. Réponses:
    1
  2. Réponses:
    1
  3. Réponses:
    1
  4. Réponses:
    0
  5. Réponses:
    1
  6. Réponses:
    0
  7. Réponses:
    0
  8. Réponses:
    0