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Humanisme, compassion et anarchisme

Discussion dans 'Musique et contre-cultures' créé par Damona, 24 Mars 2023.

  1. Elicec
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    Elicec Membre du forum Membre actif

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  2. anarchiste, anarcho-féministe, féministe, situationniste, révolutionnaire, anti-fasciste, anti-autoritaire

    Ce que j'en pense, c'est que tu devrais appliquer ce que tu dis.
     
  3. Damona
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    Damona Membre du forum

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    Mar 2023
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    Oui, il existe effectivement un conformisme tendanciel de type économique et idéologique. Mais il existe aussi, je crois, un anticonformisme vis-à-vis du collectif, justement parce qu'il n'y a pas de "corps social" mais une foule d'individus disparates contraints de vivre ensemble. Je pense à tous les gens qui ont ce genre de réflexion assez puériles et très égocentriques, que nous avons sûrement tous eues à un moment ou un autre : "je fais ce que je veux, les autres je m'en fous", ou encore ceux qui s'évertuent à croire que ce que pensent les autres n'a pas d'impact sur eux. Sur ce dernier point, on est vraiment dans la résistance à la souffrance morale et affective que peut provoquer la compassion. A moins encore une fois de souffrir de pathologies (de type psychopathie), il est naturel que nous soyons plus ou moins affectés par ce qu'autrui pense de nous. Se persuader que le regard d'autrui n'a pas d'importance, c'est ériger un bouclier contre la souffrance que ce regard pourrait engendrer en nous. Alors je dis "plus ou moins" parce qu'il est évident que c'est propre à chacun et à chaque situation en fonction de notre échelle individuelle de valeurs : on peut effectivement ne pas être touché par le regard négatif d'autrui si on pense que ce jugement n'est pas fondé ni valable, ou procède de la pure méchanceté (notamment lorsqu'il porte sur des préférences personnelles ou des idées qui n'ont aucun impact sur la vie en collectivité).
    Donc oui, l'individualisme n'est pas incompatible avec un conformisme économique mais il est incompatible avec la vie en collectivité lorsqu'il a pour objet de réaliser des actions égoïstes en court-circuitant nos capacités émotionnelles.

    Oui je comprends ton point de vue et ta volonté d'appuyer sur l'intérêt de la collectivité plutôt que la vague notion d'un "Autre" qui supposerait un individu et je suis d'accord avec toi, même si l'individu hypothétique représente en fait l'ensemble de la collectivité puisque n'importe qui peut se substituer à cet "Autre". Disons alors que, pour être une force qui soutient la justice, la compassion devrait être cultivée comme une capacité qui tend à se mettre à la place d'autrui, avant d'agir ou de ne pas agir, et ce dans le bien de tous.
    Exemple : mon voisin agriculteur a besoin d'eau pour son champ en monoculture, je comprends sa détresse à voir ses récoltes périr du fait de la raréfaction de cette ressource, mais lui en autoriser le monopole serait nier également les besoins en eau de la collectivité ; il nous faudra donc réfléchir ensemble afin de trouver une solution qui satisfasse l'ensemble.
     
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  4. Damona
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    Damona Membre du forum

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    Mar 2023
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    Oui c'est super intéressant, on pourrait imaginer un système avec deux degrés de mesure compassionnelle, le premier étant une compassion individuelle, le deuxième degré, qui a priorité sur la premier, étant la compassion collective.
    En droit on parle de "hiérarchie des normes" (les règles supranationales l'emportent sur les règles nationales) mais bon, du coup la formule n'est pas la meilleure dans une société qui se veut l'antithèse de la hiérarchie... même si l'anarchie, telle que je l'entends, est une société sans chef, sans classe, sans hiérarchie entre les individus de manière à évincer les rapports de domination inhérents à l'organisation sociale hiérarchique. Ainsi, le fait qu'on reconnaisse une hiérarchie des normes ne me paraît pas antinomique d'une organisation sociale qui, quant à elle, serait anarchique.

    Alors ici la question est pratique : c'est de savoir qui fait la loi et qui l'a fait appliquer.
    En effet on le voit bien, ces deux rôles sont éminemment créateurs de pouvoir, donc de domination. On a eu beau s'organiser selon la séparation tripartite des pouvoirs, ça n'a pas empêcher un mode de gouvernance de plus en plus despotique. On peut citer en exemple les multiples intrusions de l'exécutif en matière judiciaire ou encore les convergences d'intérêt (pour ne pas dire collusions) entre le législatif et l'exécutif. Un petit exemple parmi d'autres, favorable à la "délinquance en col blanc" : la loi du 27 février 2017 a réformé les délais de prescription en matière pénale, dans l’objectif d’allonger la possibilité de mise en mouvement de l’action publique à partir de la révélation des faits (non pas de leur commission), or, dans cette même loi, un amendement spécifique concernant les délais de prescription des crimes et délits financiers été inclus afin que ceux-ci ne soient pas concernés par les allongements de délais de prescription. En effet, les infractions économiques et financières, toujours opérées dans l’ombre et donc nécessitant un certain temps avant d’être décelées, se voient quant à elles bénéficier d’une date butoir de douze ans, qui commence à courir non pas à partir de la date de révélation des faits, mais à partir de la date de commission.
    Pour moi c'est une conséquence directe de notre démocratie indirecte composée de millions d'individus : l'ensemble de la collectivité cède son pouvoir décisionnaire à des individus sensés les représenter, par delà leurs divergences d'opinions et d'intérêts. Nous créons ainsi les conditions favorables à l'émergence de situation de domination.
    Dans les sociétés anarchiques qui ont existé, les trois pouvoirs n'étaient pas séparés mais tenus directement par les individus composant la collectivité. D'ailleurs beaucoup d'entre elles fonctionnaient au consensus : tant que l'ensemble de la collectivité n'était pas unanime, il n'y avait pas de prise de décision.

    Ça c'est super intéressant et je pense que ce postulat de départ ne peut que rétablir le dialogue, rapprocher les gens, donc lutter contre les divisions sociales et rétablir un front commun. Nous sommes arrivés à un tel point de division sociale, que, en fonction du positionnement de l'un ou l'autre sur des sujets précis, nous nions leurs capacités humaines et coupons court à tout dialogue. En plus d'être une solution de facilité qui ne fait qu'aggraver les conflits sociaux, elle a permis de rallier à elle une frange considérable de la population française au RN.
    Je pense que nous avons tort de partir du principe que si Untel pense quelque chose qui nous apparaît être une horreur, c'est parce qu'il est foncièrement mauvais. Si nous reconnaissons en cette personne un humain, il doit avoir ses raisons, qu'elles soient erronées ou non, de penser ce qu'il pense et en discutant avec lui nous pourrions comprendre son point de vue et essayer de lui faire changer de positionnement afin qu'il révise peut-être son jugement. C'est chiant et épuisant, c'est clair, d'autant plus si cet Untel est borné, aucun argumentaire ne saura le convaincre. Mais, généralement, derrière le racisme et toutes les autres formes de détestations sociales se cachent une véritable souffrance sociale qu'il ne faut pas nier, comme le fait la gauche, parce qu'ils essaient de compenser cette souffrance en trouvant une solution de facilité avec le rejet de leur colère légitime sur une cible illégitime ; un bouc émissaire.
    Enfin c'est compliqué... C'est toujours compliqué avec l'humain. Je discutais ce matin avec une caissière qui me disait qu'elle votait Le Pen. Je continue de discuter avec elle, et elle me dit que si elle avait 20 ans de moins elle serait dans la rue à manifester, qu'elle aurait été à Ste Soline, que des fois elle a envie que les lieux de pouvoir explosent, qu'elle veut une société plus juste où les gens ne travaillent pas comme des esclaves, à la solde d'un patron, etc. Je lui dis : "vous voulez une société sans hiérarchie ?". Elle me dit : "oui, c'est ça. Une société où les gens décident vraiment de ce qui est bon pour eux et ne se fait pas manipuler par une caste qui s'en met plein les poches". Je lui dis : "vous voulez une société sans rapport de domination et d'assujettissement, donc une société anarchiste". Elle s'exclame : "oui, c'est ça". Mais par quel miracle Marine Le Pen arrive-t-elle à faire croire aux ouvriers qu'elle va œuvrer pour une société plus juste, anticapitaliste et anarchiste ?
    Ce miracle, je crois, d'une certaine manière, c'est la compassion. La compassion instrumentalisée, bien sûr, mais elle ne nie pas la souffrance des ouvriers qui s'épanche malheureusement sur les mauvaises cibles, par la crainte qu'ils inspirent (le "Grand Remplacement", que ça soit un remplacement par les étrangers et leur religion, les femmes, d'un monde étrange peuplé à l'avenir uniquement d'homosexuels, de transsexuels et de pédophiles - il faut aller sur les sites/forums de droite pour s'apercevoir de l'insondable sottise du monde effrayant qu'ils prédisent), elle ne leur dit pas qu'ils sont des gros cons, des monstres d'intolérance, et qu'ils n'ont pas le droit d'exprimer cette souffrance au risque d'être sanctionnés pénalement. Bien sûr qu'ils se trompent de cibles, mais si on les traite avec mépris et rejet et qu'on leur interdit d'exprimer cette souffrance, il n'est pas surprenant que beaucoup trouvent du réconfort dans l'extrême droite qui sait les flatter.

    Encore faut-il être en mesure d'imaginer le fonctionnement d'une société non-capitaliste et de la concrétiser. Les gens ne se rallient pas à des idées, l'inconnu leur fait peur, la théorie aussi. Par contre, s'ils peuvent expérimenter d'eux-mêmes des modes de vie qui fonctionnent bien, là ça a un réel impact et ça peut les convertir à l'idée que oui, une société anarchique non-capitaliste, ça peut fonctionner et rendre heureux.
    Tu avais mentionné le troc dans un autre post, aucun ethnographe n'a jamais constaté l'existence du troc dans aucune société. Le troc, tel que les occidentaux le conçoivent (je te donne trois poireaux, tu me coupes les cheveux), n'a jamais existé. Dans les petites sociétés anarchiques, chacun fait pour la collectivité, et les services que les uns se rendent aux autres, comme les tâches que les uns accomplissent pour les autres, sont perçus comme des services à effet différé : je t'aide aujourd'hui, tu m'aideras quand tu pourras. Un peu comme on le fait naturellement avec notre famille en se rendant des services et en s'entraidant.
     
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  5. Damona
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    Damona Membre du forum

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    Je vais passer outre la mesquine insulte à mon égard pour te répondre que oui, tu as raison et c'est difficile. Comme il est écrit, la compassion est exigeante, elle est un effort au quotidien, et, comme tout être humain, j'ai mes faiblesses, mes mauvais jours, les mauvaises conditions qui font que, parfois, je me laisse aller aux solutions de facilité que sont l'agacement, les mauvaises plaisanteries ou les injures pour couper court à tout effort intellectuel et affectif et perte de temps en paroles avec des gens dont je pense qu'il est stérile de discuter. Néanmoins, j'essaie de ne pas perdre de vue cette capacité compassionnelle et de la cultiver, pour vivre en accord avec mes croyances.
    Merci à toi d'avoir lu ce texte, en espérant qu'il t'a apporté quelque chose de bénéfique.
     
  6. Anarchie 13
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    Anarchie 13   Comité auto-gestion Membre actif

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  7. libertaire, anarchiste, marxiste, individualiste, révolutionnaire, anti-fasciste
    Effectivement mais je pense qu'il s'agit d'un conformisme caché. Le fait de paraître anticonformiste est dans certains cas / cercles valorisé socialement. Comme à l'école quand on traite d'intellos ou de suceurs les élèves qui suivent en cours ou de manière plus générale respectent les consignes et obéissent aux adultes...

    on est bien d'accords.

    Sur ce point je pende qu'il faut se méfier. Comme ne l'a pas fait la gauche (et moi même) avec les gilets jaunes. Des discours de ce type ne me semblent pas incompatibles avec le fascisme. Faut pas oublier que le fascisme a été inspiré par des syndicalistes révolutionnaires et anarcho-syndicalistes (comme Sorel ou Mussolini lui même), qu'un Maurras disait que la monarchie c'est "l'anarchie + 1", etc... C'est une des raisons qui m'ont fait admettre l'importance de l'idéologie et non de la posture ou des grandes phrases aussi contestataires qu'elles puissent avoir l'air. Donc ça ne me choque pas que des gens prétendant vouloir l'anarchie et tenant des discours seditieux votent RN. Le fascisme se pretend contestataire voire révolutionnaire (c'est même dans le nom des JNR). Les gudards taguent des ACAB, crament des poubelles et caillassent les flics.
    D'ailleurs tu omets de dire que le fascisme ne déplace pas tant la colère des ouvriers sur les étrangers que sur un type particulier de capital : le capital financier / la finance. Ce n'est pas la faute des étrangers qui volent le travail si on est pauvre, c'est la faute de grands capitalistes qui, notamment, font venir de la main d'œuvre étrangère, mais également corrompent le pouvoir politique, les médias, laissent faire les délinquants et se foutent de la culture nationale parce que tout ce qui les intéresse c'est le fric et l'idéologie woke... C'est surtout cet aspect du discours qui détourne les aspirations socialistes du prolétariat. Enfin à mon avis.
     
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  8. anarch
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  9. libertaire, anarchiste, auto-gestionnaire, synthèsiste, anti-fasciste, anti-autoritaire
    Oui pour moi c'est comme ça que je vois l'anarchie, et je pense que les gens le pratiquent déjà sur des cercles plus larges que la famille. D'autant plus pour les organisations d'aides solidaires, etc. le font dans des cercles plus larges encore. Donc à développer à mon avis.


    Alors ici je voulais plus l'énoncer comme un fait, pour montrer que jouer/développer sur la compassion individuelle n'a pas trop d'intérêt parce que tout le monde a déjà de la compassion pour son cercle au moins intime/proche d'individus, et ce n'est pas cette compassion individuelle qui changera les choses (entendre la/les sociétés). Mais bien le travail sur cette compassion collective (qui par pression changera aussi les comportements individuels dû à la compassion individuelle).

    Mais pour clarifier ton point, je veux préciser deux choses :
    1) Un fasciste (et ce qui s'en rapproche) ça ne se convainc pas. Ce sont des personnes qui ont déjà des positions très nette sur le rôle des hiéarchies et des oppressions et qui sont bien content de pouvoir les exercés (et/ou même les subir). Ce sont des ennemis, dans le sens où, ils sont là pour nous détruire (et quand je dis nous, c'est encore pire pour toutes les minorités). Donc vraiment pas de temps à perdre, et d'alliés à mettre en danger. D'ailleurs il n'y a qu'à voir l'actualité en ce moment, entre les flics et les groupuscules fascistes qui se réveillent pas mal.
    2) Concernant l'éléctorat RN, y'a quand même une grosse partie raciste, ou du moins, nationaliste. Et la montée du FN n'est pas dû à une colère mal comprise par la gauche, mais tout simplement par un travail idéologique d'extrême droite très bien réussi au fil des années (y'a qu'à voir les études sur les émissions d'Hanouna et leur rapport, direct et indirect, avec la promotion de l'ED). Et aussi l’inexistence d'une gauche réellement anti-capitaliste. Travail idéologique de l'ED, qui se base sur la confusion, le mensonge (à chaque élection ça promet des "lois sociales" et ça vote systématiquement contre à l'Assemblée), et la haine de l'autre, que ce soit l'étranger, comme menace, ou bien aussi, comme le dis @Anarchie13, les riches, comme menace, mais pas en tant que classe, mais en tant que groupe déterminé/essentialisé, comme les juifs auparavant (et c'est toujours un peu le cas), ou simplement les ultra riche à la Bernard Arnaud, etc.
    D'ailleurs un point d'arrêt sur le mensonge comme succès de l'extrême-droite : Il y a un excellent bouquin de Daniel Guérin qui s'appelle "Fascime, Promesses et Réalités", qui parle de la montée du fascisme en Italie et en Allemagne avant la 2sd guerre mondiale, et qui montre comment (et @Anarchie13 en a parlé plus tôt), ces partis fascistes ont vraiment fait beaucoup de promesses socialistes (enfin de gauche quoi) pour accéder au pouvoir, et bien sûr ils ont rien tenu. Mais il y a pleins d'autres dynamiques qui sont expliqués. Et en gros c'est ce qu'on vit maintenant quoi.

    Donc on a qu'à y perdre à faire ce travail sur des gens qui ont des positions problématiques par leur haine, leur dangerosité, leur pouvoir de destruction. (Et je parle aussi d'expérience, car pour certains (et pas d'ED), j'ai cru pouvoir faire qqchose, mais à part perdre du temps de vie, et de l'espoir j'ai rien fait d'autre). Et je trouve ça important aussi de pas culpabiliser, rallier les minorités qui en prennent pleins la gueule de ne pas avoir cette compassion individuelle.

    Je pense plus stratégiquement que ce qu'on peut faire, c'est faire un travail idéologique, à diffuser un peu partout, travailler sur cette compassion collective, et ensuite, voir l'effet sur le collectif. Sans chercher à créer d'unité, un front commun, où à réunir tout le monde sous certaines bannières. Et peut-être que comme l'ED a réussi sur pas mal d'années, on réussira à banaliser des idées, des alternatives libertaires qui fleuriront et convertiront une proportion de plus en plus grande de la population vers un vécu anarchiste.
    De toute façon on peut pas crée vraiment d'unité factice, en se donnant des principes et des règles même compassionnelles. La seule chose qui crée de l'unité c'est la convergence idéologique, l'envie d'être ensemble, vraiment cette compassion collective qui provient d'un partage idéologique antérieure à l'unité. Pour moi, et je pense être bien matérialiste là dessus, c'est pas les règles qui créent des communautés, mais des communautés qui créent les règles.
     
  10. Damona
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    Mar 2023
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    Oui tout à fait c'est le paradoxe du conformisme anti-conformiste. On le voit également à travers les mouvements de type "sous-culture" (underground) ou, à force d'instaurer des codes puristes, ces mouvements deviennent de véritables microcosmes conformistes plus ou moins tolérants à l'égard de ceux qui se revendiquent de la même appartenance en fonction de leur degré d'écart avec ces codes. Finalement, ce paradoxe n'est-il pas la preuve que le conformisme est un impératif de la nature humaine et que toutes velléités anti-conformistes n'est pas un absolu mais seulement une réaction d'opposition relative à une conception identitaire dans laquelle l'individu ne se reconnait pas ? Il ne s'agirait pas d'anti-conformisme à proprement parlé mais d'alter-conformisme.


    Bon alors là j'ai bien conscience d'avancer en terrain miné d'autant plus que je ne connais pas du tout les milieux organisés de l'extrême droite (Sorel, pour moi c'est la marque des bottes de neige que j'ai depuis dix ans, JNR et GUD tu me les fais découvrir, etc.).
    En gros, si j'ai bien compris, l'extrême gauche comme l'extrême droite sont révolutionnaires : ils aspirent à une société en rupture avec celle que nous connaissons, ils ont les mêmes modes d'action, mais pas la même vision de ce que serait cette autre société, c'est ça ? En fait, c'est quoi l'idéologie de l'extrême droite, hormis le fait qu'ils soient xénophobes ? Les groupes néo-nazis reprennent-ils vraiment l'idéologie d'Hitler avec la race aryenne, la volonté d'extermination des juifs, des gens du voyage, des homo, des infirmes, etc ? Sont-ils nombreux ? Pourquoi adoptent-ils ce genre d'idéologie ? Est-ce parce que ça comble leurs failles narcissiques, en leur faisant croire qu'ils sont plus forts et meilleurs que les autres ?
    Je ne connais pas et donc je ne comprends pas l'extrême droite. Je connais pas mal de gens qui étaient communistes, qui sont devenus frontistes sans pour autant être racistes (ils ont des collègues et des amis de tout horizon, certains sont même en couple avec des personnes qui n'ont pas la citoyenneté française). Je cherche à comprendre par quel cheminement ils en sont arrivés là. Ceux que je connais sont attachés aux valeurs françaises et notamment à la laïcité, donc l'islam leur fait peur en raison de sa nature politique (ils aiment bien le christianisme parce qu'il est devenu un peu folklorique mais n'a plus vocation à leur imposer une façon de vivre), ils ont donc été déçu de l'extrême gauche par ce qu'ils voient comme une complaisance envers l'islamisme.
    Je pense aussi qu'ils sont pour le coup vraiment réactionnaires, dans le sens où ils voient que la société se transforme, ça leur fait peur, ils ont l'impression de perdre leur position privilégiée, on ne les laisse pas exprimer leurs craintes et ils cultivent donc une forme de résistance passéiste à ces changements qu'ils subissent.
    Dans une certaine mesure, je les comprends : à mon sens la société ne devrait pas se transformer de manière à ce qu'une domination se substitue à une autre et, en ce sens, certaines questions qu'ils posent sont légitimes et méritent d'être débattues collectivement plutôt que de les empêcher de les exprimer en jetant l'opprobre sur eux (et, ce faisant, en les radicalisant davantage puisqu'ils se sentent incompris et humiliés).

    Mais oui, totalement ! C'est vrai que les discours le péniste ont carrément changé depuis Marine. Quand on l'écoute, on peut être étonné de voir qu'elle reprend des arguments qu'auraient pu avoir Georges Marchais (qui était aussi un nationaliste). Du coup je comprends que d'anciens extrême gauche partent à l'extrême droite. Alors je pose la question parce que je n'en sais rien : en quoi est-ce qu'elle a tort sur ces points ? Pourquoi le prolétariat se détournent du socialisme (je n'aime pas ce terme, le PS lui a fait perdre toute crédibilité) pour voter RN ? Que pouvons-nous faire contre ça ? Quel sont les dangers aujourd'hui du RN ?
     
  11. Damona
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    Mar 2023
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    Oui, j'avais compris ^^ mais je voulais attirer l'attention, avec ta phrase, sur le fait que la compassion amène aussi à ne pas prendre son adversaire idéologique comme une pourriture, un monstre, à nier en définitive sa nature humaine et le dépouiller de toutes qualités et donc, à ne pas le considérer avec compassion, quand bien même ses divergences idéologiques s'opposent aux nôtres et nous paraissent être odieuses.

    Alors on fait quoi, on les tue ? On les emprisonne ? On les met dans des centres de rééducation ?

    Si pour toi être français ne t'apporte aucune satisfaction personnelle, peux-tu concevoir que, d'une part tu seras français aux yeux des étrangers, c'est indéniable, d'autant que tu as été éduqué en France, tu dois avoir énormément de caractéristiques françaises, consciemment ou inconsciemment, comme tous les français que nous sommes ? Et d'autre part, peux-tu concevoir et accepter que certains puissent être attachés aux valeurs nationalistes sans que cela ne les pousse vers le racisme et la xénophobie, comme d'autres peuvent être attaché aux valeurs régionalistes ?
    En quoi le régionalisme et le nationalisme sont-ils inacceptables s'ils sont corrélés à la tolérance et à la bienveillance ? Moi, je viens de la banlieue parisienne, j'ai été dans pas mal d'endroit en France, et chaque fois les gens s'aperçoivent que je suis de la banlieue parisienne parce que j'en ai adopté tous les habitus. Ce n'est pas grave, il n'y a pas de malveillance, ça participe aussi à la diversité culturelle, à l'échange (dieu soit loué nous avons des différences, nous pouvons en rire, les partager, nous étonner, etc.).
    Et surtout, c'est naturel chez l'humain. Depuis la nuit des temps, nous créons des groupuscules identitaires dont nous sommes fiers, avec ses particularités propres, ses idéologies et ses croyances propres, et ce n'est pas un mal en soi, au contraire, c'est une richesse. Je pense que l'identitarisme devient un danger seulement s'il devient intolérant, prosélyte, guerrier et dominateur en établissant une hiérarchie de type racialiste.

    C'est quoi ED ?
    Oui, d'ailleurs tous les dictateurs du 19e (sauf Franco il me semble) sont passés par ou venaient du socialisme...

    Ok je comprends, c'est vrai que les humains peuvent être très bornés et qu'à part perdre son temps... A commencé par moi-même, il y a certains sujets sur lesquels je suis intimement persuadée d'avoir raison et sur lesquels je ne changerai pas d'avis (mon opposition au capitalisme, et à tout rapport de domination).

    Oui, ça ça me plait bien. Mais il est certain que 1. l'Etat français ne laissera pas faire ça si facilement et que, plus des gens se rallieront à ces idées/ce mode de vie, plus l'opposition gouvernementale sera forte (cf l'actualité) ; 2. des gens s'opposeront toujours à ces idées/ce mode de vie, parce qu'ils n'en veulent pas et nous ne pourront pas les convaincre.
     
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  12. anarch
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  13. libertaire, anarchiste, auto-gestionnaire, synthèsiste, anti-fasciste, anti-autoritaire
    Alors oui ton point de vue est intéressant, mais j'irai plus loin en disant que ignorer sa nature humaine, c'est se refuser à analyser les choses tels qu'elles sont et se rendre aveugle sur le fait qu'on peut devenir soi même le monstre qu'on voit chez l'autre.

    Bah je pense que ce serait pas anarchiste d'adopter une posture, une politique unique vis à vis d'un groupe de personnes qu'on qualifierait de fasciste. Et puis tel que je le pense il n'y aura pas de loi et police pour l'appliquer. Mais ce sont des ennemis de fait d'un monde anarchiste. Donc il faudra juste continuer à faire ce qu'on fait aujourd'hui, c'est à dire continuer le combat social pour qu'ils se sentent marginaux et s'efface peu à peu, aussi pour prévenir de nouvel adhérent à ses idées nauséabondes. En parallèle, constituer des organisations de défense, comme les orga antifasciste, pour s'en défendre directement. Se défendre contre leurs exactions.

    Le nationalisme c'est très connoté faire de son identité un enjeu politique. Avoir une lecture du monde où des identités liés à des pays/régions sont figés, et ça à tendance à générer pas mal de discriminations vis à vis des nombreuses identités qui existent. Je vois pas de sincère bienveillance possible dans le nationalisme.

    Extrême droite, pardon.

    Oui, mais au moins t'as l'air de faire l'effort pour ne pas l'être, ça change bcp.

    Ah oui c'est sûr, mais si on est nombreux, ça change tout.
     
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  14. anarch
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  15. libertaire, anarchiste, auto-gestionnaire, synthèsiste, anti-fasciste, anti-autoritaire
    Elle a tort parce qu'elle remet pas le capitalisme en cause, mais juste un état des choses et qu'en plus elle ment, comme le gouvernement actuel. D'ailleurs Daniel Guérin dans le Fascisme et le Grand Capital raconte aussi un truc pertinent : enfaite le fascisme a tendance à être du côté du capitalisme industriel, et à être plutôt opposé au capitalisme de consommation/divertissement. Donc c'est facile de tirer sur les riches qui font Disney+ avec des perso trans dans un dessin animé, plutôt que Dassault, qui tu comprends est essentiel pour notre pays, etc..

    Alors pourquoi les gens se détournent de la gauche, pour l'extrême droite. Parce qu'ils sont abreuvés de panique morales, d'idéologies essentialistes, capitalistes qui dégradent la vision de l'être humain et de ses capacités et provoquent un sentiment d'insécurité qui fait que les gens n'ont plus confiance/envie de collectif, de faire société avec les autres. Mais plutôt envie de maintenir l'ordre des choses, en s'adressant aux bonnes institutions pour satisfaire ses besoins et intérêts. l'État pour la police, les entreprises pour les biens et services, etc.

    Le danger du RN ajd c'est de légitimer la pensée fasciste et de développer la confiance, l'activité et le nombre des groupes fascistes. Casse de grèves, intidimations, violencse et meurtres des minorités et opposants politiques, etc. Et en parallèle de faire du Macron actuel dans la gestion de l'État. C'est à dire se vendre aux capitalistes.

    Pour ce qu'il faut faire contre ça, j'ai déjà répondu au dessus. On peut rien faire d'heroique. Faut travailler à notre échelle sur ce qu'on peut, pour créer de la solidarité et l'envie de s'organiser anarchiquement, et lutter contre toute instance de pouvoir.
     
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  16. Anarchie 13
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    Anarchie 13   Comité auto-gestion Membre actif

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  17. libertaire, anarchiste, marxiste, individualiste, révolutionnaire, anti-fasciste
    Je t'avoue que la question est un peu alambiquée et que je ne suis pas sur de l'avoir comprise. Mais je suis d'accord avec la première partie : "le conformisme est un impératif de la nature humaine".

    Alors pour moi pas du tout.
    Dans ma conception une révolution est un changement de mode de production qui constitue l'aboutissement du renversement d'une classe par une autre. Le capitalisme polarise la société entre deux classes antagonistes uniques : la bourgeoisie qui porte le mode de production capitaliste et le prolétariat qui porte le mode de production communiste.
    Le fascisme de son côté se présente comme une "troisième voie" entre le libéralisme (économique comme culturel) et le communisme. Cependant le fascisme se prétend révolutionnaire et reprend des postures et discours de révolutionnaires afin de mobiliser le prolétariat. Mais c'est du paraître et le fascisme ne remet jamais en question le salariat et la propriété privée des moyens de production.
    Également je distingue fascisme et extrême-droite. Là tu parlais spécifiquement du RN qui pour moi est un parti à tendance fasciste.

    Je ne sais pas s'il y a une idéologie d'extreme-droite à part le nationalisme (et comme tu dis son pendant le nationalisme).

    Pour ce qui est du fascisme de mon point de vue la matrice idéologique du fascisme c'est la fusion des intérêts de classe avec les intérêts nationaux, ce qui exige une certaine distorsion de la réalité. L'idée de base c'est qu'une oligarchie (et c'est pourquoi il faut être prudent avec ce terme) transnationale retire la souveraineté à la nation, donc au peuple. Cette élite est essentiellement l'incarnation de la finance - avec une opposition entre un capital financier / fictif / improductif international et un capital industriel / productif / réel national. Elle corrompt le personnel politique et les médias pour faire passer une propagande libérale et / ou communiste selon le contexte dont l'objectif est dans tous les cas de détruire l'identité culturelle nationale du peuple et ses valeurs traditionnelles afin de mieux l'asservir. Si tu veux un exemple de ce qu'on fait de mieux en fascisme en france actuellement tu peux regarder du côté d'égalité et réconciliation, c'en est un archétype (avec l'antisémitisme en prime car quand la finance s'incarne c'est généralement en Juif).
    Je ne pense pas que le racisme soit indispensable au fascisme, actuellement les mouvements fascismes s'inspirent davantage de "l'ethno-différencialisme" du GRECE avec les fameux choc des civilisations, grand remplacement, etc... On n'a plus des juifs qui font tout pour métisser les autres races afin de dégrader leurs patrimoines génétiques. On a des GAFAM et des banques, des "milliardaires", bref une élite qui fait tout pour métisser les cultures, pousser des peuples aux cultures différentes à s'entredétruire (via l'immigration) voire détruire directement les culture (par le progressisme, le wokisme, etc...) afin d'abrutir les peuples et de les rendre vulnérables.

    Sont-ils nombreux ? Pour l'instant non, je pense qu'on est pas encore proche du mouvement de masse fasciste. Cependant c'est aussi dû à la médiocrité de l'extrême-droite française. Je ne pense pas que des personnes trop explicitement racistes parviennent à rassembler au XXIeme siècle. Mais c'est pas (à mon avis) grâce au militantisme antifasciste qui, je pense, ne serait pas à la hauteur si aujourd'hui un parti fasciste qui tient la route émergeait. Le RN est à tendance fasciste mais il ne parvient pas à l'assumer car il se sent proche du pouvoir par les élections. Par exemple il ne rejette pas l'OTAN et reste parlementariste.

    Pour ce qui est du succès du RN dans le prolétariat y a donc le fait que le fascisme rejette le libéralisme (culturel notamment) ce qui est rare à gauche (dans des partis suffisamment importants pour participer aux élections en tout cas). Egalement le RN propose des réformes prétendument (et parfois réellement) sociales. Bref, tout ce qu'on appelle le "populisme".

    Pour moi c'est antinomique. A partir du moment où tu privilégies ton groupe mathématiquement tu handicapes l'autre / ton groupe est privilégié par rapport à l'étranger.
     
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  18. Damona
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    Damona Membre du forum

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    Mar 2023
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    Merci à tous les deux pour vos réponses dont je prends bonnes notes et qui me font m'apercevoir que je manque cruellement de culture sur l'extrême droite au point que j'ai pu être influencée par elle sans le savoir... Je vais parcourir la section "Anti-fascisme et lutte contre l'extrême-droite" de ce forum afin de me renseigner et d'éviter de vous faire perdre du temps avec mes questions qui trouveront, sans nul doute, réponses dans cette section. Je vois qu'Anarchie 13 y a pas mal contribué et tes apports m'ont l'air fort instructifs.

    Pour le nationalisme, oui je comprends, c'est un terme à forte charge émotionnelle et idéologique qui, historiquement, implique de l'intolérance et de la violence, il faudrait en inventer un autre plus adéquat. A ce propos, je sais que (tu m'excuseras pour l'anti-matérialisme relatif dont les historiens font preuve sur le sujet) le nationalisme a été cultivé et exacerbé par un véritable endoctrinement, notamment chez les enfants via les manuels scolaires d'histoire, après la défaite de Sedan et ce, jusqu'à la première guerre mondiale. Ce n'est pas de ce sentiment-là que je voulais parler, mais juste du fait qu'il est naturel, chez l'humain, de se constituer une identité collective et d'en être satisfait ou "fier", sans pour autant que cette fierté nous pousse à l'intolérance et à une vision suprémaciste. Les ethnographes n'ont pas rapporté que la fierté identitaire est nécessairement corrélative à une volonté d'annihilation ou de domination des identités des autres ethnies, tribus ou peuples.

    Après, là où je voulais en venir avec la compassion et l'ED, ce n'est ni pour minimiser ni pour accréditer leurs propos, encore moins pour avoir une vision angélique à leur égard en prétendant naïvement que nous pourrions les convaincre qu'ils ont torts ou lutter contre leurs idéaux violents en acceptant leur violence sans réagir, seulement je pense qu'il faut rester mesuré et se garder d'avoir des jugements simplistes et sectaires de type manichéens. Il y a beaucoup de gens qui se laissent séduire par les thèses de l'extrême-droite, sans pour autant êtres d'odieux monstres, il faut aussi comprendre pourquoi et ne pas les traiter avec rudesse au risque de susciter chez eux une forte réaction d'opposition ou pire, de radicalisation. Enfin, je m'interroge sur le fait que, selon une dichotomie radicale, est-ce pertinent de se construire automatiquement en contradiction absolue avec l'extrême droite quand bien même ils soulèvent des questions qui méritent d'être réfléchies ?
    Personnellement je n'aime pas les positions tranchées que je trouve faciles, simplistes et intolérantes. L'Anekāntavāda (« doctrine de la multiplicité des points de vue » des jaïns) m'est chère, et selon celle-ci, je ne rejette jamais des idéologies, sous le seul prétexte que les membres qui en seraient à l'origine seraient mes ennemis, si je ne les ai pas entendues et réfléchies afin de me positionner rationnellement, et non passionnellement, vis-à-vis de celles-ci. Je ne sais pas si je suis claire. En tout cas, merci pour vos réponses bienveillantes.
     
  19. Anarchie 13
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    Anarchie 13   Comité auto-gestion Membre actif

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    Jan 2009
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  20. libertaire, anarchiste, marxiste, individualiste, révolutionnaire, anti-fasciste
    Je suis d'accord avec toi que certaines questions intéressant l'extrême-droite sont souvent balayées par l'extrême-gauche (en particulier concernant la sécurité / la criminalité / les comportements anti-sociaux).
    Cependant, l'extrême-droite n'est pas tant décriée parce qu'elle pose ces questions que par les réponses qu'elle y apporte et surtout, surtout, les raisonnements qui l'amènent à proposer ces réponses.
     
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  21. Damona
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    Damona Membre du forum

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    Mar 2023
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    Merci. Je suis tout à fait d'accord avec toi, et du coup ça me rassure quant à mon affiliation au mouvement anarchiste.
     
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