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Capital et confusion, chapitre 1

Discussion dans 'Politique et débats de société' créé par GARAP.ORG, 29 Septembre 2014.

  1. GARAP.ORG
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    GARAP.ORG Membre du forum

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    Août 2014
    GARAP, communiqué N°33, septembre 2014

    Le grand retour de l'alchimie foutraque à l'ère de la dévalorisation


    Cette brave goule suceuse de sang qu'est la relation capitaliste se trouve bien loin de ses beaux jours où ayant fait de l'Europe de l'Ouest son Bastion elle s'avançait, aventurière qu'elle était, dans les arcanes d'un monde qui ne portait encore aucune marque de son existence au cou.
    C'est que suçant et suçant encore femmes et hommes, entourant de ses bras d'acier industrieux le monde, fusionnant presque totalement avec lui à force d'accumulation de l'activité gratuite, de pillage de l'environnement et d’extorsion de plus-value, notre brave cadavre accuse tout les traits de l'étouffement.
    A trop boire les fleuves des jus de l'humanité, notre chère valeur d'échange a fini, dans sa mutation spectaculaire finale, par revêtir la figure de la tique. Une tique bien trop pleine, bien trop grasse, bien trop juteuse, s'intoxiquant des flux perpétuels qu'elle ingurgite tout en étant incapable de remettre en cause leur éternité. Prisonnière d'elle-même dans la tension perpétuelle d'une grotesque question de vie ou de mort.

    Dans l'époque qui s'ouvre à nous sous les auspices de ce dieu ridicule et brutal, croulant de son poids de parasite, bien des repères vacillent qui pourtant avaient guidé l'époque précédente. Le mouvement ouvrier a été dissous, plus par une série d'experts que par les faits, dans de soi-disant « nouveaux mouvements sociaux » ; la stupide distinction genrée et son oppression monogamique ne semblent plus capable de contenir l'incroyable potentialité du désir humain ; l’Europe et les États-unis apparaissent de moins en moins comme les leaders incontestables du capitalisme, mais se voient de plus en plus soumis à lui par l'intermédiaire de leur dette ; des pays autrefois émergeants se trouve à devoir financer leur maître américain pour ne pas scier la branche capitaliste sur laquelle ils ont mis des décennies à s’asseoir ; le « progrès » : direction et directeur de l'humanité euh...du monde capitaliste occidental depuis au moins deux siècles fusionne enfin avec son double réactionnaire. Et voilà les staliniens pratiquants d'hier devenant les religieux intégristes d'aujourd'hui, à l'image du clown négationniste Garaudy ou du tragi-comique Carlos que le tout commun a vite fait (et bien fait) d'oublier dans des poubelles qui ont plus à voir avec une fosse sceptique qu'avec l'histoire et sa grande hache gna gna gna gna.

    Mais il n'est pas ici lieu d'hurler avec ces loups d'anciens maoïstes de nouveaux-philosophes sur la perte de repères du XXIème et sur la destruction que fut Mai 68. Mai 68 n'a pas été qu’une révolution, loin de là, c'est même, sur bien des points, l’événement qui témoigne de l'ouverture de secteurs entiers à la socialisation capitaliste.
    Peut être fut-ce même sinon le point de départ du moins le point à partir duquel la nouvelle alchimie du capitalisme, sa nouvelle ère, pouvait commencer à être décelée. Les vieux éléments qui le composaient : à la plus-value absolue et l'impérialisme unilatéral qui la soutenaient, avait définitivement fait place la plus-value relative dans les centres de reproduction capitalistes ; l'angoissante claustrophobie de la cellule familiale commençait à montrer les signes d'une timide ouverture ; la course à l’énergie et à la pollution arrivait à sa fin théorique dans cette catastrophe permanente qu'est le nucléaire. Merci belle France qui ne fut jamais la dernière dans ces horreurs !

    Bref, les anciens arômes qui composaient notre sauce capitaliste ont fini depuis quelque temps déjà de flotter dans les airs. L'alchimiste désincarné qui préside à la recette du désastre gouverné par la Valeur a radicalement modifié les ingrédients de sa douteuse mixture, laissant au passage totalement désemparée la critique révolutionnaire qui, de n'avoir pu le suivre, s'en est allée, dans le meilleur des cas, lécher les pieds de l'étatisme, de la bêtise religieuse ou du nationalisme ou des trois à la fois, pourquoi pas ?

    C'est quelque chose comme une liste de course que nous cherchons à présenter ici.
    Une liste de certains ingrédients qui ont aujourd'hui été mélangés pour nous être servis avec cette odeur de ridicule et de dangerosité qui sied merveilleusement au merdier total.
    Sur quoi portera précisément une telle liste ?
    Rassurez-vous ! Pas sur tous ceux qui tombent sous l’appellation de « merde » dans un monde capitaliste : liste quasi-infinie si il en est !! Nous ne nous intéresserons qu'à une sécrétion particulière de l'époque : le confusionnisme.
    Cette confusion n'en est pas une dans l'absolu mais se pose comme telle à n'importe quelle personne sincèrement révolutionnaire, n'importe quelle personne qui se pose réellement la question de l'abolition de la société de l'accumulation du travail abstrait par la destruction de la société de classe. Ainsi, de confusion nous pouvons discerner plusieurs types :

    - les plus stupides concentrés : comme dans certaines formes de conspirationnisme qui, tellement prisonnières de l'abstraction du fétiche-capital, tentent dans un espoir vain de recréer un sentiment de sécurité en fantasmant des groupes de plein contrôle ourdissant complot sur complot dans l'objectif de contrôler un monde qu'ils contrôlent de toute manière déjà. Les tenants de telles théories se complaisant par là dans une très confortable théorie de l'impuissance, qui doit, pour le coup, ravir les médias spectaculaires qui en sont les producteurs et qui lui donnent pignon sur rue.
    Ces types de conspirations en eux-mêmes ne sont pas intéressants car ni leur argumentaire, ni leur force matérielle ne sont aujourd'hui pertinents ou étendus. C'est plutôt une composante idéologique qui transpire dans notre gentil monde, qui suinte comme du pue par la bouche des hérauts de la réaction, du retour au formes de dominations sociales qui ont fait les grandes heures de la relation sociale capitalistique : la famille autoritaire monogame, la nation comme fantasme de la fin de la division des classes sociales, le travail rédempteur, la femme essentialisée comme domestique d'un homme non moins essentialisé comme bête de somme.

    - Les plus diffus : ceux qui innervent plus directement la vie politique elle-même, ceux que l'on imagine même ne pas interroger tellement ils ont réussi à embrasser la forme de l'évidence et de l'allant-de-soi. On compte parmi eux le nationalisme « de gauche » du capital, l'antifascisme, l'anti-impérialisme, la défense des religions minoritaires, la préoccupation pour le « populaire », et d'autres choses qui composaient jadis certains « acquis », certains terrains de prédilection et chasses gardées de la gauche et de l'extrême-gauche du capital. Autant de sujets aujourd'hui repris par l'extrême-droite du capital, attisant ce rapprochement entre les deux manières les plus radicales de gérer la relation sociale capitaliste.

    C'est cette seconde forme de confusionnisme qu'on aimerait aborder ici : les convergences entre deux modes de gestion du capital : son extrême-gauche et son extrême-droite.
    Nous laisserons de côté la critique des argumentaires, et nous ne chercherons pas à montrer comment l'anti-impérialisme ou la défense de la religion étaient de toute façon en soi des postures non révolutionnaires, mais plus à montrer les liens réels et matériels qui existent bel et bien entre ces deux ennemis spectaculairement opposés, et pourtant si prompts à se réconcilier sur l'oreiller des nécessités du capital.

    Plus une liste de course qu'autre chose donc car il n'y a que peu de cohérence, peu de classifications possibles, juste des suites d'individus et de groupes qui réussissent tous, ou projettent de réussir, avec plus ou moins de succès à maintenir la relation sociale fondamentale qui régénère le capital : le travail abstrait.

    La suite sur http://garap.org/communiques/communique33.php
     
  2. ninaa
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    ninaa Membre du forum Expulsé du forum

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  3. anarchiste, anarcho-féministe, individualiste
  4. GARAP.ORG
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    Août 2014
    Pas de retour actuellement. Ce texte n'est présent que sur internet. Il est un peu trop long pour être imprimé sous forme de tract mais il pourrait faire une bonne brochure.
     
  5. KickTick
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  6. extrême-gauche, révolutionnaire
    Il est trop compliqué je trouve, il faudrait des textes plus clairs parce qu'ils sont quand même super intéressant mais faut s'accrocher.
     
  7. X-Or
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    X-Or Nouveau membre

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    Oct 2014
    Salut,
    En fait il existe des textes bien plus compliqué que ça, qui datent du XIXème jusqu'au début du XXème siècle, et qui s'adressent directement aux prolétaires qui pourtant, à l'époque , avaient accès à l'éducation beaucoup plus difficilement qu'aujourd'hui. Et ces textes ont inspiré les heures les plus glorieuses de l'histoire du mouvement ouvrier. Entre temps la télé, le divertissement, le showbusiness, la playstation bref, le spectacle marchand est passé par là, abrutissant la société toute entière, désormais incapable de produire une réflexion qui lui permettrait de comprendre son propre monde, et donc de le transformer.
    Le travail de "vulgarisation" qui vise à exprimer des analyses complexes avec des mots simples est important, et ne semble pas être le point fort du GARAP.
    Mais à ne faire que cela, on accompagne l'infantilisation programmée par le système que l'on combat.
    Le travail d'éveil de la conscience de classe vise au contraire à encourager le prolétaire à se libérer de ce conditionnement mental, et à se réapproprier ses propres facultés mentales. Car à la base, le prolo n'est pas plus con qu'un autre, l'histoire le prouve. Quand je lis le texte du GARAP, je ne me dis pas "c'est trop compliqué" je me demande "pourquoi je ne comprends pas ?" et je retourne bouquiner. :ecouteurs:
     
  8. Anarchie 13
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    Anarchie 13   Comité auto-gestion Membre actif

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  9. libertaire, anarchiste, marxiste, individualiste, révolutionnaire, anti-fasciste
    C'est une vision intéressante des choses, quoique pas très originale : as-tu des preuves que les prolétaires de l'époque ont effectivement lus les textes dont tu parles ? Si oui, as-tu la preuve que c'est bien de cette lecture que leur est subitement tombé dessus la volonté de changer le monde ? N'est-ce pas plutôt leurs conditions qui, à un moment précis, ne leur ont pas laisser tellement le choix que de se révolter ?

    "Infantilisation"... Tu parles plus haut de "produire une réflexion qui [...] permettrait de comprendre son propre monde, et donc de le transformer.". Faut-il nécessairement passer par une prose alambiquée pour produire cette réflexion ? Tu penses que sans les concepts de "spectaculaire-marchand" les prolétaires sont incapables de cerner en quoi secret-story c'est de la merde, ou en quoi les emballages sont des trucs inutiles qui servent juste à te faire passer la même merde qu'avant pour un bouquet de roses ?
    De mon côté je crois qu'à s'en tenir à un dialecte qui ne parle qu'à des initiés on marque une frontière entre les prolétaires lambdas et "le monde du militantisme". Je crois que c'est un des problèmes majeurs qui participent à ce que les prolétaires ne voient pas ce qu'il y a de politique dans leur action quotidienne, puisqu'ils se formulent cette routine sous des termes qui ne sont pas reconnus comme étant "politiques". Et puis je trouve ça un peu avant-gardiste la réponse que m'avait faite GARAP.org à savoir que c'est aux prolétaires de faire l'effort pour comprendre leurs textes. Pourquoi est-ce-qu'ils feraient ça ? Je tombe par hasard sur un texte que je comprends pas parce que la langue utilisée est trop académique pour moi ben je passe mon chemin, je me dis pas "si ça se trouve ça pourrait m'être utile, faisons trois ave maria, flagellons-nous et travaillons méthodiquement à comprendre ce texte !". Des textes il y en a des milliards, donc si je n'ai pas une raison suffisante qui me pousse à faire l'effort de comprendre un texte, je me fatigue pas, je passe mon chemin. Et je ne pense pas être une exception, y a juste des trucs qui me passionnent plus que de passer trois heures à décrypter un texte de 30 lignes.

    Ouais, mais toi tu sais sans doute déjà ce qu'est "l'autonomie prolétarienne", du moins tu te doutes que c'est un mouvement d'extrême-gauche (ultra-gauche vous préférez peut-être), tu sais sans doute à peu près leurs idées (contre le capitalisme et contre les partis / syndicats comme organisations pour lutter...), tu sais au moins que ce site est libertaire, et tu t'es sans doute inscrit dessus pour ça, et que si des textes sont relayées dessus elles ont une certaine intimité avec les convictions anarchistes... Bref, ce serait faux de dire que tu es dans la même situation qu'un mec qui tomberait par hasard dessus.
    D'où la question que j'ai posée à GARAP, à qui sont destinés ces textes, à des convaincus qui les lisent parce qu'ils les cherchent ou à n'importe quel prolétaire qui pourrait tomber dessus en surfant sur le web (ou auquel vous l'auriez distribué dans la rue, mais d'après ce que j'ai compris vous le faites pas trop) ? Parce que si c'est le deuxième cas, j'ai des doutes quant à l'efficacité de la démarche vu comme c'est chaud à comprendre.
    Sinon, c'est pas une histoire d'être cons mais d'être plus ou moins intimes avec un registre langagier. Je ne considère pas ribéry comme un con sous prétexte qu'il fait des fautes de grammaire ou de conjugaison (et je trouve même vachement arrogante la façon dont il a été trainé dans la boue pour ça). D'ailleurs j'écoute beaucoup de rap... Et puis mon meilleur ami est dyslexique. (bon je déconne...)
    En tout cas, l'école participe à la sélection par la promotion d'une culture de laquelle les classes populaires sont moins proches (en tout cas c'est la thèse de Bourdieu), ça ne fait certainement pas de ceux qui rate à l'école des cons, ça fait juste de l'école un instrument (bourgeois ? berkberkberk, je n'aime pas cette classification) de distinction.

    Après je suis critique mais ce que je comprends du GARAP j'aime bien, et vos interventions sur radio vosstanie sont très intéressante, et puis vous avez même l'air cool en tant que personnes. Donc pas d'animosité dans ce que je dis :ecouteurs:
     
  10. ninaa
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  11. anarchiste, anarcho-féministe, individualiste
    J'en reviens pas moi même mais je suis complètement d'accord avec le post d'anarchie13!

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  12. X-Or
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    Oct 2014
    Comme je viens de m’inscrire sur ce forum je vais te parler un peu de moi :
    Il y a quelques semaines le proprio de mon immeuble a décidé de doubler (voire tripler pour certains) les charges locatives, sans prévenir ni expliquer quoique ce soit. La plupart des locataires ont décidé d’aller au syndic tous ensemble, et il a fallu préparer la rencontre. Avec ma compagne on a passé une nuit a éplucher toutes les factures pour comprendre comment fonctionnait leur comptabilité. J’ai dû me taper en entier le règlement de copropriété, l’état descriptif de division, ainsi que l’article 2 de la loi du 26/08/1987 relative aux charges locatives. Je te cache pas que c’est pas ma passion dans la vie. Ce soir-là je crois que c’était les Prouters qui jouaient au Turku, et j’aurais préféré boire des coups avec mes potes. C’est aussi ce que le directeur du syndic aurait préféré.

    La comparaison va te paraitre étrange, mais je crois que c’est exactement la même démarche que choisissent certain-es prolétaires animé-es d’une volonté révolutionnaire d’étudier une matière aussi chiante que l’économie politique. Cette matière exige une méthode et un vocabulaire qui lui sont propres, exactement comme les mathématiques ou l’astronomie. Tu sais comme moi que les maths ça peut être chiant comme ça peut être passionnant, si ça vient d’un intérêt personnel. Et c’est passionnant car cela permet d’analyser la façon dont fonctionne le système capitaliste, mais aussi de le combattre et d’imaginer l’après-capitalisme.

    A mon avis, dans certains secteurs comme les services publics, le bâtiment, les transports, la métallurgie ect, ou le rapport de force avec le patronat est le plus visible, peu d’ouvrier-es seraient effrayé-es par la prose du GARAP, à part peut-être les plus jeunes. Je pense que c’est peut-être plus à ce type de prolétaires que le texte s’adresse, qu’à des militants qui sont censé déjà savoir tout ça.
     
  13. KickTick
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  14. extrême-gauche, révolutionnaire
    C'est pas totalement faux ce que tu dis. Le problème c'est que dans une société dépolitisée il faut une sorte 'd'hégémonie culturelle" avant de passer à la suite, à plus complexe : genre quand y'a une extrème gauche, un courant libertaire/révolutionnaire très ofrt bah les gens vont s'intéresser à ce genre d'articles... dans une société dépolitisée bah non. Y'a pas de perspectives de toute façon, alors pourquoi se taper des tartines dur à lire ? Ca changera rien à ta vie...
     
  15. Anarchie 13
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    Anarchie 13   Comité auto-gestion Membre actif

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  16. libertaire, anarchiste, marxiste, individualiste, révolutionnaire, anti-fasciste
    Sauf que la comparaison n'est pas totalement pertinente je trouve. Tu étais confronté à un problème concret et c'est pour le surmonter que tu t'es servi d'un outil textuel.
    Là c'est différent, c'est un outil de propagande donc un outil dont tu te sers avant d'en connaitre l'utilité, l'utilité tu ne l'apprendrais que plus tard (et hypothétiquement). Un peu comme ce qu'on voit en cours où on te dit "ça te servira plus tard".

    Après je suis d'accord avec toi sur le fait qu'on puisse être passionné par tout, comme disait l'autre tout dépend de la façon dont le regarde. Mais pour autant je ne crois pas qu'un vocabulaire spécifique soit nécessaire. J'ai même plutôt l'impression qu'il sert un snobisme, une volonté de la part du monde scientifique / militant / politique de se démarquer de "la masse" plus que de véritablement désigner des concepts pas encore nommés.
    Perso je suis en socio et on est tenté souvent de reprendre les termes des sociologues qu'on a vu. Et si je fais une petite introspection j'ai plus l'impression que c'est pour palabrer devant les profs pour montrer qu'on a bien appris et pour se distinguer par conséquent, mais pour se distinguer avant toute chose aux yeux des sociologues attitrés, on ne s'adresse alors plus qu'aux sociologues, c'est par eux qu'on a envie d'être compris parce que ce sont eux qui vont nous promouvoir (en nous décernant un diplôme, en nous publiant, en nous citant, en nous critiquant...).
    Je pense que le même phénomène peut avoir lieu dans le milieu militant, on emploi un lexique spécifique pour montrer qu'on sait de quoi on parle. A qui ? Aux autres militants pour avoir une place au milieu de toute la ribambelle d'orgas ou aux yeux des prolétaires pour leur montrer "qu'ils peuvent avoir confiance en nous parce qu'on s'y connait" (avec pour seule preuve qu'on parle compliqué) ?

    Après bien sûr que les ouvriers seraient sans doute pas effrayés par ça, si ils ont un intérêt bien particulier de lire ces textes ils le feront probablement.

    Par contre je pense que ce n'est pas avec des textes qu'on peut changer les choses de toute façon et que discuter à l'oral (discuter pas faire une conférence hein ?) est plus efficace parce qu'on peut te répondre directement, de demander d'éclaircir certains points, puis même simplement lutter concrètement... Les textes et la théorie ne viennent qu'ensuite, quand l'expérience nous a confronté à des problèmes, où qu'on doit rendre compte de certains choix qu'on a fait... Enfin bon...

    Je dis ça de manière générale parce que c'est surtout le texte de présentation du GARAP je crois qui m'a semblé bien chaud, les autres que j'ai lu (ceux sur les sous-fascistes, celui-là, société communiste, la RATP et un autre sur l'entreprise) j'irais pas jusqu'à dire qu'ils étaient simples mais y avait quand même moins de concepts comme spectaculaire-marchand, baisse tendancielle du taux de profit, ou tout ça tout ça...
    Mais en même temps je suis sans doute une bille en économie politique.

    edit : c'est d'ailleurs marrant, depuis que je suis petit on nous bassine avec "la télé ça rend imbécile, les enfants ne lisent plus", outre que ce sont probablement des conneries (les enfants lisent certainement plus qu'avant), on nous incite souvent à lire pour lire, si bien que j'en suis venu à lire pour pouvoir dire que j'ai lu un livre et espérer que ça se grave dans ma mémoire sans n'avoir rien retenu. Encore aujourd'hui, j'ai du mal à arrêter de lire un livre qui ne m'intéresse manifestement pas et je le continue jusqu'au bout. C'est pour ça que j'ai des doutes. Pour moi un texte c'est un outil comme n'importe lequel, tu te sers pas d'un marteau quand t'en as pas besoin donc pareil pour le texte.
     
  17. GARAP.ORG
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  18. Anarchie 13
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  19. libertaire, anarchiste, marxiste, individualiste, révolutionnaire, anti-fasciste
    ça va. Par contre ce serait bien si vous définissiez ce que vous entendez par "Capital", surtout que vous vous en servez comme d'un sujet agissant. En tout cas je lis beaucoup ce mot et j'arrive pas bien à savoir ce qu'il y a derrière, peut-être suis-je le seul.
    Pareil pour "totalitarisme marchand" parce que j'ai du mal avec cette notion.
     
    Dernière édition par un modérateur: 7 Octobre 2014
  20. GARAP.ORG
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    Août 2014
    Le capital est un rapport social, plus précisément un rapport de production des activités humaines mais avant tout un rapport d'exploitation.
    Dans L'Homme Sisyphe, tu peux remplacer "L'Homme Sisyphe est le produit du capital" par "L'Homme Sisyphe est le produit du rapport d'exploitation capitaliste".
    (Lire Karl Marx)

    Le totalitarisme marchand veut définir l'époque que nous vivons depuis la seconde guerre mondiale. La marchandise a pénétré toutes les sphères de la vie. La marchandise, la production et les rapports capitalistes régissent toute la vie de l'humanité, c'est en cela que c'est totalitaire : c'est un monopole idéologique et pratique totalisé.
    (Lire Guy Debord)
     
  21. X-Or
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    Oct 2014
    Je ne savais pas que tu étais étudiant en socio. C'est parce qu'elles fonctionnent dans le cadre du capitalisme que les écoles et universités placent les élèves en concurrence entre eux, reproduisant tous les rapports de domination existants pour les habituer à leur future réalité. Les profs aussi doivent sans cesse prouver qu'ils sont à la hauteur de leurs prétentions. Je suis d'accord avec toi, c'est naze et ça transforme l'enseignement en éducation, une forme de conditionnement intellectuel qui rend compatible avec le fonctionnement économique actuel. C'est pourquoi les mouvements étudiants me semblent tout aussi importants que les conflits sociaux dans les entreprises, et doivent être soutenus avec autant d'énergie. Mais j'espère que dans la future société communiste, les enfants ne seront pas dispensés d'apprendre à lire, à écrire, compter etc...
    Je veillerai à ce que mon enfant apprenne tout ça, non pas pour m'assurer une domination sur lui, mais pour lui permettre, à défaut d'être utile dans une société communiste, de se défendre dans une société capitaliste. C'est par la transmission de savoir entre les générations que l'humanité a pu progresser jusqu'à aujourd'hui, et la pensée révolutionnaire ne devrait pas échapper à cette règle.

    Pour en revenir à la forme, c'est parce que l'économie politique à découvert certaines choses qu'il a fallu mettre des mots sur ces choses pour les nommer, en parler, et continuer à avancer. Cela permet aussi de s'affranchir du langage courant qui est façonné par le capitalisme. Tu sais comme moi à quel point la grammaire française est sexiste, mais toutes les autres formes de domination sont aussi présentes dans le langage courant. Quand le patron parle d'un "employé" ou d'un "collaborateur", je préfère dire un exploité. Quand Dieudonné parle de "riches" et du "peuple", je préfère dire bourgeois et prolétaire. En proposant aux gens une autre façon de nommer les choses, on leur propose une autre façon de penser, qui n'est plus celle de leurs ennemis.

    Pour finir, d'accord avec toi que rien ne vaut une bonne discussion de visu, mais quand l'homme de Sisyphe cherche à s'informer, il se colle derrière son PC et commence par ouvrir google. C'est regrettable, mais c'est donc là qu'il faut aller le chercher, la démarche du GARAP me parait être la bonne, comme l'existence de ce forum. Sans parler de la portée internationale d'internet, qui devrait profiter à la pensée internationaliste, justement.
     
  22. ninaa
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  23. anarchiste, anarcho-féministe, individualiste
    J'ai montré cet article à deux copains ouvriers (un câbleur sur un chantier et un mécanicien à la SNCF), sans leur dire ma propre opinion pour pas les influencer.
    Déjà rien que le titre ça leur a pas trop parlé ("L'homme quoi"?).
    Dès le deuxième paragraphe, zyva, "matérialisme dialectique"...
    (perso, je ne suis pas allée plus loin. Suis-je une militante minable parce que j'ignore ce que ça veut dire? comme mes camarades j'ai pas fait d'études et je viens d'un milieu prolo inculte...)
    Rien que le fond nous a mis mal à l'aise. Décrire les prolos (même si "quand même y en a des biens...) comme des veaux décérébrés juste bons à regarder des conneries à la télé c'est un peu hurler avec les loups, non?
    Autant le dire je ne suis pas d'accord avec l'idée de renvoyer dos à dos oppresseurs et opprimés. Il y a des tas de raisons autres que la connerie des gens qui n'ont pas fait d'études et se tuent au boulot pour expliquer qu'ils ne se révoltent pas davantage: la fatigue, la peur de perdre son boulot et donc son logement...
    Le copain qui se lève à cinq heures du mat pour aller bosser en chantier n'a pas envie de se faire donner des leçons de militantisme parce que le soir il n'est pas en état de lire le Capital ou des articles qui ne se lisent qu'avec un dictionnaire.

    Je précise que je n'ai rien contre la lecture de livres politiques, au contraire! La lecture de Malatesta, Bakounine et Kropotkine m'a beaucoup apporté. J'ai également apprécié "Les Naufragés" de Declerk et "Principes élémentaires de propagande de guerre". Pas la peine d'avoir un dico à portée de main pour comprendre ce que les auteurs veulent dire.

    Et c'est pas parce qu'ils "manquent de vocabulaire" ou de "culture économique" (même vulgarisée, ce qui n'est d'ailleurs pas le cas dans ces articles) que les opprimés (ouvriers, chômeurs, précaires...) ne comprennent pas en quoi consiste leur oppression, les enjeux stratégiques du patronat, des actionnaires et des centrales syndicales, qu'ils font confiance aux élus, ni qu'ils manquent de réflexion politique!
    Les gens que j'ai vu lutter le plus radicalement étaient des sans papiers, dont beaucoup ne savaient ni lire ni écrire, ne parlaient que le bambara...

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  24. X-Or
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    Oct 2014
    Je ne crois pas qu'il s'agisse de renvoyer dos à dos oppresseurs et opprimés, mais de constater lucidement en tant qu'opprimés ce que nos oppresseurs ont fait de nous et comment ils nous tiennent à leur merci. Ce qui devrait nous donner envie de s'émanciper de cette condition. En tout cas c'est comme ça que je l'ai compris, mais si c'est l'effet inverse qui se produit, alors en effet il faut de poser des questions.
     
  25. GARAP.ORG
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    Août 2014
    ninaa, la réaction de tes copains montre à quel point l'abrutissement du prolétariat est une réalité dramatique. Le titre du texte est l'homme sisyphe ou le prolétaire servile, si tu ne comprends pas ce qu'est le mythe de sisyphe (qui pourtant est défini dans le texte en dessous...) tu peux comprendre ce que veut dire prolétaire servile.
    Tout est question de volonté dans ce cas-là. Comme on n'est pas des assistantes sociales ni des professeurs d'écoles, on s'adresse qu'aux gens qui veulent réellement lutter et réfléchir. Et critiquer notre classe, ce n'est pas "renvoyer dos à dos oppresseurs et opprimés". Le prolétariat n'est pas un saint que l'on adore religieusement, sous prétexte que nous sommes les pauvres opprimés, au contraire nous voulons le détruire avec les autres classes. Ce texte n'est pas une leçon de morale mais un constat. La révolte existe en chacun de nous, encore faut-il l'utiliser intelligemment.
     
  26. ninaa
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    ninaa Membre du forum Expulsé du forum

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    Fev 2014
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  27. anarchiste, anarcho-féministe, individualiste
    C'est peut-être (encore) de la maladresse mais là tu serais pas en train de traiter mes camarades d'abrutis?

    Est-ce que les sans papiers analphabètes et ne parlant que bambara sont moins "intelligents" que vous, est-ce qu'ils luttent moins bien que vous?

    Qu'est-ce que les gens "intelligents" font concrètement de plus, ou mieux, que mes camarades ou que les sans papiers "incultes"?

    Ces camarades personne ne parle de les "adorer religieusement" mais ce sont d'excellents militants, qui savent lutter au quotidien et pousser leurs collègues à la lutte et à l'autonomie des luttes, et largement aussi lucides et "intelligents" que les auteurs de ce texte à mon avis.

    Alors stp gardez pour vous votre mépris et vos insultes.
     
  28. Anarchie 13
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    Anarchie 13   Comité auto-gestion Membre actif

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    Jan 2009
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  29. libertaire, anarchiste, marxiste, individualiste, révolutionnaire, anti-fasciste
    Qu'entends-tu par "l'humanité a progressé" ?

    Oui mais je relativiserais ce constat. Je ne vois pas en quoi c'est une spécificité du capitalisme, toutes les sociétés emploient des mots différents, connotés différemment aussi pour désigner les mêmes phénomènes matériels. Là vous mettez - je dis vous parce que cette transformation du langage me semble être une partie de ce que le garap entend par totalitarisme marchand - une intentionnalité, comme si les patrons disaient "collaborateurs" au lieu de "prolétaires" uniquement pour dissimuler l'exploitation. Or, ce n'est pas parce que ça a cet effet que c'est le but des patrons. A mon avis ils pensent sincèrement que le terme convient plus pas juste parce qu'il masque le rapport de domination mais parce qu'ils pensent que ce rapport n'existe pas / plus ou dans une mesure beaucoup moins importante qu'avant de sorte que les anciens mots ne conviennent plus pour définir ce nouveau rapport.

    Ouais, mais je te rappelle que pour quelqu'un qui pense en "leurs" termes, les patrons ne sont pas des "ennemis", donc ta façon de penser n'est qu'une façon de penser et pas La Vérité. C'est pourquoi ils n'ont pas plus de raison que ça de faire d'effort pour la comprendre. Pourquoi ne chercheraient-ils pas à comprendre ce qui oppose celle de Hollande de celle Sarko plutôt ?
    D'autant plus que "prolétaire" et "bourgeois" ça fait un peu vieilli (à cause du capitalisme sans doute) donc pour des gens qu'ont pas lu Marx je pense qu'il faut leur repréciser ce qu'on entend par là avant de les utiliser comme si la seule raison pour laquelle ils ne chercheraient pas à comprendre est qu'ils ne veulent pas se révolter (c'est peut-être aussi simplement à cause de l'image qu'ont ces termes actuellement, ceux qui les utilisent et le fait que le GARAP n'est pas la seule organisation qui prétend lutte). Pour des gens qui ne sont pas aussi intimes que nous avec les désaccords fondamentaux qui opposent les différents mouvements se disant révolutionnaires on est tous des "gens d'extrême-gauche". Donc le GARAP si ils accrochent pas, ils vont voir vers un autre mouvement d'extrême-gauche parce que "dans le fond c'est la même chose".

    A mon avis, ce n'est que mon avis, faudrait vraiment souligner ce qui vous différencie de ce que vous appelez "l'extrême/ultra-gauche du capital". C'est bien fait dans le corps du texte de présentation je trouve (enfin je m'en souviens pas en détail mais vous expliquez que vous êtes contre les syndicats et les partis ce qui est important) par contre l'intro risque d'en rebuter certains avec "une énième chapelle marxiste-léniniste" ou une "commune invisible" où vous devez faire référence à "l'insurrection qui vient", référence que peu de personnes ont hors des milieux militants je pense... Du coup déjà là à mon avis certains doivent ne pas se sentir concerné.

    Moi aussi quand je cherche à m'informer je vais sur google...

    Sinon je suis d'accord avec ninaa sur ses deux posts. Je ne pense pas qu'on ait besoin forcément de grandes théories pour se révolter. On sait plus ou moins ce qui nous est désagréable et on cherche à s'en débarrasser et quand on est assez nombreux dans une même situation, les mots viennent d'eux-mêmes. Le principal problème est probablement l'isolement.
    Sinon que pensez-vous de ce message de la sulfateuse (que je ne cite pas pour la première fois), il explique mieux que moi (j'ai souligné ce qui me semble le plus en rapport avec mon propos) :

    Pour la discussion dans sa totalité :

    http://forums.resistance.tk/message.php?t=11109&highlight=avant+gardisme
     
  30. KickTick
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    KickTick Membre du forum

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    Mai 2012
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  31. extrême-gauche, révolutionnaire
    Je ne sais pas combien de fois je dois plussoyer.

    Sinon pour GARAP.org, je te trouve condesçant/condescendant (?), c'est facile de dire "je suis pas un éducateur, j'ai pas à faire ceci celà". Tu dis que le prolétariat est abruti (ce qui est faux même si beaucoup de gens sont pris au piège entre le fait de devoir réussir individuellement et l'espoir de résurrection collective, ce qui donne Soral-Dieudo et compagnie), en gros vous êtes une avant garde ?

    Pour moi les choses viennent de la lutte, tu remarqueras que dans des sociétés très sexistes, racistes, sans éducation, ben y'a des réflexions qui vont très loin qui se mettent en place par des gens qui savent pas lire (Espagne de 36 par exemple, russie/ukraine etc) pourtant les gens sont "abrutis" (et à coté du pecor ukrainien de base en 17, je pense que le conspi actuel peut remballer).

    Bref le pb c'est l'isolement et les pratiques plus que les théories c'est ça l'important.
     
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